Test | Gone Home
12 mars 2016

Une famille formidable

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Gone Home

Le pitch de départ de Gone Home tient en une ligne : juin 1995, après un voyage en Europe de plusieurs mois, Kaitlin, 21 ans, rentre chez elle dans la maison familiale en Oregon. Problème : personne n'est venu l'accueillir à l'aéroport.

L'histoire

Dans Gone Home vous n'avez pas droit à la classique introduction, aux traditionnelles cut-scenes ou encore moins aux dialogues explicatifs avec des personnages. Toute seule sur le perron de la maison de votre famille, vous n'avez d'autre choix que de pousser la porte et entrer. Ah mince, la porte est fermée. Où diable la clé est-elle d'habitude rangée ? Ah oui, sous le pot de fleurs, logique. Donc, vous entrez pour trouver une maison tristement vide. Vous rappelant vaguement le premier chapitre de Resident Evil, vous explorez les pièces, à la recherche d'indices. Assez naturellement, vous saisissez le courrier posé sur la table d'entrée, écoutez les messages laissés sur le répondeur, fouillez dans un placard, poussez jusqu'au couloir menant au bureau de votre père...

Petit à petit vous recollez les morceaux d'une famille sans histoires ou presque : un père écrivain raté obsédé par l'assassinat de JFK qui trouve enfin le succès grâce à une maison d'édition spécialisée dans les publications obscures ; une mère garde forestière qui gravit les échelons mais a également des doutes sur son couple ; et une petite sœur dont l'amour impossible de sa copine devient l'objet principal de votre enquête familiale. Vous pensiez que ça serait la fête en rentrant mais c'est finalement loin d'être le cas.
La maison du bonheur

Le principe

Écrans et lampes allumés, maison déserte : bienvenue chez vous.

En vue subjective, vous explorez chaque pièce, chaque recoins, retournez chaque livre, chaque sous-bock, observez chaque petit bout de papier, déchiffrez chaque note sur chaque post-it... Rien ne doit être laissé au hasard, même si tout ne vous sert pas à avancer. La plupart des éléments contribuent à crédibiliser la vie de la maison. Du linge qui traîne, un frigo rempli, des cartouches de jeux vidéo éparpillées dans la chambre, des piles de magazines... Tout cela vous aide à en savoir un peu plus sur votre famille qui a continué à vivre pendant votre absence.

Vous êtes libre d'évoluer comme vous le souhaitez, cependant le sous-sol, la cuisine et le grenier ne sont accessibles qu'en trouvant comment les ouvrir. Il suffit pour cela d'être attentif, de prendre soin de lire les quelques éléments et écouter les mémos vocaux associés à quelques objets pour saisir ce qui anime chaque membre de votre famille, en particulier votre sœur. Cette dernière fait l'objet d'une attention particulière puisqu'elle passera par plusieurs phases précédant et suivant son coming-out, pas franchement bien appréhendé par ses parents.
Stephane Plaza m'a tout appris

Pour qui ?

Maintenant, vous savez.

Il est intéressant de constater une recrudescence de jeux à la vue subjective dénués de tout personnage. À la manière d'un Everybody's Gone To The Rapture ou de The Vanishing of Ethan Carter, vous évoluez dans un environnement totalement laissé à l'abandon, figé dans le temps, comme si les occupants s'étaient volatilisés. Mais cela ne doit pas vous perturber dans Gone Home : les détails à foison semés par les membres de la famille laissent transparaître une activité riche entre les murs. The Fullbright Company a réussi le tour de force d'imprégner une présence forte de ses personnages sans jamais les montrer. Côté prise en main, ne vous attendez pas à de l'action, des rebondissements et des interactions compliquées : le stick directionnel et un bouton pour saisir les objet suffisent à couvrir l'ensemble des possibilités, dans une exploration à votre rythme. Même si en réalité deux heures suffisent à faire le tour du propriétaire et repartir avec une histoire de drame familial sur les bras.
On a bien visité, on va faire une offre

L'anecdote

On l'a tous fait.

Étant donné que Gone Home repose avant tout sur l'histoire et la manière dont elle est rendue crédible par son environnement, j'ai d'emblée activé les commentaires de l'équipe. Et je ne l'ai absolument pas regretté. Disséminés un peu partout, les commentaires vous éclairent grandement sur des détails qui paraissent insignifiants mais ont nécessité des jours de travail. Aviez-vous remarqué que dans la plupart des jeux, les lampes n'ont pas de cordon électrique ? Chez The Fullbright Company ils ont poussé le vice à créer chaque cordon de lampe, relié de manière logique à des prises aux murs. Et ils vous racontent tout ça en rigolant, se demandant s'ils ne sont pas un peu fous d'avoir poussé le réalisme si loin. Mais en fait non, cela ne fait que contribuer à l'environnement de manière imperceptible.

Vous en saurez également davantage sur de nombreux éléments qui habillent la maison, comme par exemple à qui ils ont demandé d'écrire à la manière d'une maman pour un mot laissé sur un bloc-note, ou encore cette carte de vœux envoyée par un oncle, qui est en fait signée par un des créateurs de Deus Ex. Ou bien le code secret du coffre fort, 0451, où l'on découvre qui est un clin d'œil à la série des Bioshock. Il s'agit du premier code à saisir dans les jeux de la série, repris également en clin d'œil dans Deus Ex. Le game designer de Gone Home a fini par se le faire tatouer sur le bras. J'adore ces anecdotes.
Le making of aussi riche que le jeu lui-même
Les Plus
  • L'ambiance
  • La finition du titre dans les moindres détails
  • La cohérence de l'histoire avec le lieu
  • Les commentaires de l'équipe qui en apprennent beaucoup sur le jeu et comment il a été pensé
Les Moins
  • L'histoire du père semble sous-exploitée, il y avait pourtant de la matière
  • Pas d'enjeu dans les rares énigmes : il s'agit simplement de suivre le fil de l'histoire pour avancer
Résultat

Gone Home n'est pas vraiment un jeu, ni une expérience. Il s'agit d'un moment passé dans une maison déserte et pourtant imprégnée des tracas plus ou moins importants de la famille qui l'habite. Avec un souci du détail infini, cette visite virtuelle d'une demeure ordinaire vous transporte, pendant une poignée d'heures, dans l'intimité d'une famille d'Oregon. Un titre qui par sa simplicité peut d'abord surprendre voire décevoir mais peu à peu se laisse apprivoiser. Vous ressortez de cette petite aventure avec le sentiment d'avoir fait partie de cette famille déchirée. À vous de rentrer à la maison à présent.

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