Test | GTA San Andreas : Black Mic-Mac
11 nov. 2004

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Grand Theft Auto: San Andreas

GTA, tout le monde connaît : c'est un jeu dans lequel tout est possible, à défaut d'être permis. On y incarne une petite frappe qui veut devenir caïd. Chaque épisode commence mollement, avec une poignée de dollars en poche, quelques contacts et une petite portion de ville pour se livrer au grand plaisir du jeu : la glande. Outre les missions faisant avancer l'intrigue, il existe en effet quantité de petites quêtes annexes amusantes. San Andreas en propose plein : se muscler, maigrir, se faire tatouer, changer de vêtements, passer des permis, cambrioler des apparts, taguer les murs ou... faire une partie de billard. Entre autres.

Un esprit malsain dans un corps sain

Au début de San Andreas, le choix est assez réduit. Les premières heures ne sont guère intenses ; elles se résument à une espèce de tutorial faisant découvrir progressivement les nouveautés. Au fil des missions, CJ apprend à changer de look pour se faire respecter, à escalader les clôtures ou à nager, autant de possibilités que les fans réclamaient à corps et à cri. A propos de corps, il faut surveiller celui de CJ. S'il mange trop, il devient obèse et s'essouffle très vite en cas de course ; au contraire, mieux vaut le muscler pour qu'il soit plus efficace au corps-à-corps et qu'il ait une meilleure endurance pour courir, en cas de fuite. Vous verrez, la fuite, c'est très utile.

Un peu de patience

Au fur et à mesure que les heures passent et que l'accès aux différentes villes de San Andreas se débloque, le jeu prend une dimension exceptionnelle. Les décors changent, les possibilités s'étoffent, les moyens de locomotion également ; du vélo des premières missions, on finit par débloquer des gadgets à réaction énormes, dont, attention spoiler, un jetpack. Excellent. Les personnages secondaires sont très réussis, avec une mention spéciale au chef aveugle des triades qui se mange systématiquement les portes. La caricature est efficace, les missions aussi. Au hasard, c'est drôle d'arroser un champ de pavot au lance-flammes.

Black exploitation

Maintenant, soyons clairs : mieux vaut aimer la culture black pour apprécier San Andreas. Les voix (VO sous-titré en français, excellent choix), les premières missions, CJ, tout ce background va énerver ceux qui sont plus fan de films comme Les Affranchis que des Menace II Society. Là, San Andreas marque un tournant dans la série ; le jeu devient plus pop et moins classe, même si l'ascension vertigineuse de CJ finit par gommer les différences. Il n'empêche, impossible de ne pas sentir cet arrière-goût de culture rap et afro, une saveur spéciale qu'on adore ou qu'on déteste.

La brouette habituelle

Plus gênant, San Andreas ne gomme pas les défauts héréditaires de la série. Le plus grave, c'est les ralentissements ; le jeu saccade souvent et rame parfois honteusement quand la caisse qu'on conduit fume un peu trop. Manifestement, la PS2 est au bout du rouleau. Il reste aussi quantité de bugs de collision pas gênants mais qui font tache. Et un clipping bien visible. Les véhicules apparaissent d'un coup, ce qui pose problème à haute vitesse. Sans oublier les missions à refaire plein de fois parce que les scripts manquent de souplesse, que la visée n'est pas terrible ou que les caméras débloquent. Bref, les patients feraient bien d'attendre la version PC prévue pour l'été 2005 si tout va bien. En même temps, c'est un GTA : attendre encore risque d'être insupportable.

Le champ des possibles

Comme ses prédécesseurs, San Andreas étale une gamme d'actions incroyable. La liste des interactions possibles donne le tournis, surtout que chacune est très soignée. Le billard constitue par exemple un jeu dans le jeu avec paris et utilisation du stick droit pour frapper, à la manière des jeux de golf. Simple et efficace, donc ultra prenant. Seules les séances de muscu sont un peu répétitives mais rien ne vous oblige à les enchaîner. C'est ça qui est agréable avec San Andreas. La multiplication de ces opportunités donne une vraie impression de liberté, avec une trame à suivre ou non pour ajouter un peu de profondeur au tout. Le dosage est exemplaire puisque le jeu s'adapte à chaque joueur. Une réussite, une référence, un petit bijou de gameplay bien rôdé.

Tous des pourris

Outre l'envie de tout voir, de tout essayer et de tout découvrir, depuis les putes à embarquer pour aller faire un tour jusqu'aux séances de strip-tease privées, San Andreas insuffle aussi une envie de vengeance aussi discrète que perverse. CJ débarque en ville parce qu'on a buté sa mère. Et tout au long du jeu, il essuie des brimades, notamment de flics corrompus. L'envie est simple, une fois le pad en main : retrouver et exploser tous les pourris qui vous en ont fait baver. Le résultat, quand on écrase la mâchoire d'un mec à coups de pied pour lui faire sentir à quel point l'asphalte à bon goût, c'est qu'on ressort du jeu avec la haine, clairement ; la haine de tous ceux qui rabaissent, qui exploitent, qui humilient. La haine des autres, tout bêtement.
Les Plus
  • L'impression de liberté.
  • Les personnages secondaires, les voix, les véhicules et les armes.
  • L'humour corrosif du scénario et du background.
Les Moins
  • Les bugs et les ralentissements.
  • Le cynisme, la black exploitation.
Résultat

Les joueurs angéliques trouveront que San Andreas caricature avec humour un monde impitoyable, l'Amérique de Dick Cheney où le plus fort a toujours raison. Peut-être. Maintenant, il est impossible de ne pas sentir, sous ce vernis aux allures de miroir, le plaisir de la provoc gratuite et un cynisme assumé. Bien sûr, c'est drôle. Et évidemment, les deux précédents GTA utilisaient les mêmes ficelles. Ca ne dérangera donc pas les habitués de la saga ou ceux qui aiment bien le second degré. Il n'empêche que l'amertume perce sous la critique et que ce cynisme permanent finit par miner plus que par divertir. C'est sans doute ça, le goût étrange de San Andreas, celui qui éclipse le soleil façon Miami du précédent opus : un humour corrosif, qui fait rire mais qui ronge en même temps, comme l'acide.

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