L'or en plomb
Ça y est ! L'extension Episode Aigis de Persona 3 Reload est disponible, histoire de conclure en beauté l'aventure principale. Petit plus : même s'il se déroule chronologiquement après, ce DLC est accessible d'emblée, depuis le menu – pas besoin de finir le jeu original pour se lancer donc. Alors qu'est-ce qu'il apporte ? Est-ce que son prix élevé de 35 € est justifié ?
L'histoire
Le principe
Derrière ces portes, une fois un donjon fini, un flashback très sympa ou... un bête retour au hub.
Sauf que. En retirant la carte de la ville, ses destinations, les personnages non joueurs externes au dortoir et tous les petits moments de liberté que vous aviez le soir et le week-end, cette extension enlève beaucoup de vie et de charme au jeu original. Alterner entre le dortoir et le donjon signifie qu'il n'y a plus de ragots, de sorties avec des camarades de classe ni de conversations charmantes avec un couple de vieux libraires par exemple. Ni d'événements spéciaux : Ombre géante qui envahissait le dortoir, monorail devenu fou... Cette extension a un côté très utilitaire : nettoyer les donjons. Tout tourne autour de cette unique activité, y compris vos discussions dans le dortoir barricadé. Un beau gâchis, vu le potentiel ; explorer la ville et essayer de changer le cours de la journée comme dans Un jour sans fin aurait été beaucoup plus fun.
La répétition des donjons
Bien utiliser les jauges "Théurgie" des héros ajoute une dimension stratégique aux combats.
Puis au bout de quatre ou cinq heures, la photocopieuse s'emballe : vous retrouvez les mêmes décors recyclés. Les mêmes ennemis, dont seules les vulnérabilités magiques changent – super, vu que le jeu vous encourage à tester les nombreuses magies sur tous les ennemis pour documenter leurs failles et les achever facilement, et que ça coûte un nombre de points dédiés ruineux (les PC). Et surtout la même mécanique : portes "Monade" dès le deuxième sous-sol d'un nouveau donjon, Ombre Gourmande géante à courser puis à taper comme une piñata pour lui faire cracher tous ses trésors, boss, et nouvelle porte qui ramène au hub désertique. Avec comme unique carotte quelques rares cinématiques, des flashbacks très bien faits mais vraiment trop peu nombreux. Rincez et répétez, comme disent les anglais. Pendant 20 heures environ, ce qui fait beaucoup trop pour des donjons et des ennemis copiés-collés, sans intermèdes ni activités annexes en ville.
Pour qui ?
Vous retombez vite sur les mêmes ennemis, dont les vulnérabilités sont juste réinitialisées. Usant.
C'est aussi parce que l'histoire n'avance pas : la poursuite de la mystérieuse silhouette qui sert de fil conducteur est essorée jusqu'à plus soif. C'est presque un running gag : vous arrivez devant un boss, et vous voyez ce MacGuffin disparaître au coin, sous les exclamations poussives de vos héros. Ridicule. Du coup les quelques innovations comme les furies "Théurgie" ou les portes "Monade" ne suffisent pas à renouveler l'intérêt. Il manque des personnages hauts en couleur qui donnent du fil à retordre à vos héros ; des méchants dont il faudrait purifier le cœur comme dans Persona 5 : Royal. Poursuivre une ombre pendant tout le jeu, c'est un peu court jeune homme – ça ne tient pas 20 heures en tout cas.
L'anecdote
Le jeu original multiplie personnages secondaires et histoires annexes dehors, entre deux donjons.
Bref. Les donjons servaient surtout d'intermèdes la nuit, et de défouloir. Leur côté répétitif était contrebalancé par le fait que vous reveniez très vite à la surface, souvent par manque de points de magie PC – ou parce qu'une barrière infranchissable vous empêchait de rejoindre l'étage suivant avant d'avoir progressé en classe. Le meilleur moyen de compenser la répétitivité de cette extension Episode Aigis, amputée de toutes les sections vivantes du jeu original, c'est de la pratiquer à petite dose. De lancer une partie de temps en temps, sur Asus ROG Ally X ou Steam Deck par exemple ; ou en faisant autre chose, comme écouter un podcast (ou votre compagne/compagnon vous raconter sa journée). La répétition des couloirs et des ennemis a un côté hypnotisant qui passe crème au fond d'un canapé, ou d'un lit, en mode portable.
- Les combats enrichis
- Les nouvelles furies "Théurgie", les épreuves des portes "Monade"
- Le côté complétiste du Compendium de Personas
- Optimisé pour Steam Deck
- La carotte de la "vraie" fin
- La suppression du lycée, des sorties, des relations à creuser en dehors de l'équipe...
- La répétitivité des donjons générés aléatoirement – handicapant pour un dungeon crawler
- Prix élevé de 35 €
Atlus a transformé l'or d'un excellent RPG, Persona 3 Reload, en dungeon crawler plombant. Les quelques nouveautés de cette extension ne renouvellent pas suffisamment l'intérêt ; la vingtaine d'heures nécessaires à la finir pour voir la "vraie" fin deviennent vite répétitives. Donjons générés de façon procédurale, recyclage des décors et des ennemis, prétexte scénaristique étiré comme un élastique, manque de rebondissements et de narration... La variété et l'équilibrage du jeu original font cruellement défaut, tout comme les séquences en extérieur – rarissimes. En ne reprenant qu'une toute petite partie de la recette initiale (les donjons), et en la diluant beaucoup trop de surcroît, Atlus facture au prix fort le remaster de cette extension. À réserver aux fans, à petites doses quotidiennes pour ne pas trop se lasser.