Test | Paradise Lost
12 janv. 2022

Voyage en centre autoritaire

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Paradise Lost

Paradise Lost nous cache bien des choses. Un paradis ? Plutôt un espace de survie, profondément enfoui sous terre, qui semble ne fonctionner qu'à condition de respecter quelques règles drastiques... Perdu ? En effet, tout semble abandonné en l'état. Mais alors, qui donc vous parle par interphones au fil des pièces explorées ? Avec la volonté de lever le voile recouvrant ce mystérieux et gigantesque endroit, vous voilà parti dans une exploration dont vous ne ressortirez pas indemne.

L'histoire

Quelque part en Pologne, des souvenirs fugaces de votre enfance vous rappellent la difficile survie imposée aux rares survivants de la guerre totale suite à l'échec de la contre-offensive alliée en 1944. Le IIIe Reich a atteint le paroxysme de sa puissance, avant d'enfermer ses élites dans quelques bunkers enterrés au plus profond de la Terre puis de faire pleuvoir le feu nucléaire, tout comme ses ennemis. Vos souvenirs d'enfance, donc, vous situent dans des abris de fortune, loin de ces bunkers dont votre mère est originaire. À sa mort, elle vous confie une photo d'elle et d'un homme, posant dans l'un de ces abris inviolables. Ni une ni deux, vous vous rendez dans cet immense endroit abandonné, découvrant d'abord une gare et des guichets de contrôle d'identité, puis toute une ville souterraine avec ses habitations, son café, son école, son hôpital, son centre d'expériences pas très saines, son super-ordinateur qui semble avoir développé une certaine forme d'autonomie... Hum, mais où avez-vous mis les bottes ?
À la recherche des habitants perdus

Le principe

Cavernes insondables.

Jeu d'exploration en vue subjective, Paradise Lost reprend l'intégralité des classiques codes du genre. Rassurez-vous, malgré l'univers guerrier qui domine, vous n'aurez à ramasser aucune arme ni gérer un quelconque affrontement. Votre principale activité réside dans la déambulation guidée : aucune chance de se perdre, les chemins sont globalement tracés, tandis que certains objets peuvent être ramassés ou observés. Quelques rares actions et combinaisons d'objets sont nécessaires pour faire avancer l'histoire mais sans aucune difficulté ni même recherche quelconque d'énigme. Tout est globalement simple, ça n'est pas l'objet du jeu. Non, Paradise Lost veut en réalité vous conter une histoire, par l'intermédiaire de notes et magnétos abandonnés, mais aussi par votre guide qui vous mènera à travers les étages du bunker pour la délivrer, elle qui est coincée dans la salle de contrôle. À vous deux, vous aller entamer une discussion qui fera vagabonder votre réflexion sur ce qui a fait déraper ce bunker pourtant si actif quelques années auparavant, au point d'en exterminer toute sa population.
Rien ne sert de courir

Le portage Switch

Globalement on est chez des gens pas nets.

Disponible sur des plateformes plus puissantes, Paradise Lost s'en tire avec les honneurs sur Switch. C'est visuellement que le titre souffre le plus, ce qui est logique. Des décors plus flous, des contours moins précis, des textures plus approximatives : tant que vous ne regardez pas la comparaison des autres versions, la Switch propose quelque chose de très correct. Aucun ralentissement n'est à déplorer, mais une lenteur de déplacement globale vous fera vous inquiéter de la faible tension de notre héros. Sans possibilité de le faire courir, chaque traversée de cour, de pièce, ou même de couloir devient l'occasion de faire son introspection. Si encore les décors étaient à tomber...
L'amour flou

Pour qui ?

L'endroit où tout a vrillé.

Si vous recherchez un titre qui explore la dystopie d'une victoire nazie sur le monde, Paradise Lost est un candidat idéal. Avec sa progression, certes linéaire mais bien équilibrée, vous entrez peu à peu dans les arcanes de la pensée qui aurait pu dériver de découvertes informatiques après-guerre. La prise en main ne requiert aucune compétence, tandis que les rares choix de dialogues ne bénéficient que d'une incidence limitée, sans mettre en péril la trame de fond. Bouclé en une poignée d'heures, le titre vous laissera le souvenir d'une fable posthumaniste, où le genre humain est confronté à la délégation des notions de bien et de mal auprès d'une intelligence artificielle en perpétuel apprentissage. Un écho intéressant aux recherches contemporaines liées aux objets autonomes qui commencent à arriver dans nos vies.
Ode aux ingénieurs

L'anecdote

Ça va vous retourner le cerveau cette histoire.

Je dois reconnaître que la première demi-heure de jeu ne m'a pas spécialement emballé. La lourdeur de déplacement du personnage y était pour beaucoup, mais surtout l'idée d'explorer un énième lieu abandonné ne me motivait que mollement. Puis, peu à peu, alors que j'atteignais la gare d'arrivée où des monticules de bagages abandonnés devant des ornements nazis témoignaient d'une cohue passée, j'ai commencé à saisir les rouages qui ont régi ce bunker improbable. Une sélection drastique à l'entrée. Un ordre indispensable en son cœur pour que la machine tienne le choc des ans. Un objectif partagé par tous ses habitants : imaginer l'arme ultime pour sortir vainqueur d'un probable combat lors de la réouverture du bunker dans plusieurs années. Tout cela, en le percevant au fil des notes abandonnées, a suscité mon intérêt, au point de terminer le jeu d'une traite sans presque m'arrêter.
Il a fallu se faire violence
Les Plus
  • La dystopie post-nazie
  • La progression narrative
  • L'architecture assez dingue pour être crédible
  • Les discussions avec votre guide
Les Moins
  • La lenteur des déplacements
  • L'absence de réelle réflexion pour progresser
  • C'est globalement flou sur Switch
Résultat

Jouer à Paradise Lost ne requiert aucune aptitude particulière et séduira en ce sens toute personne qui veut se focaliser sur sa trame scénaristique. De fait, l'histoire s'installe progressivement pour vous emballer ensuite. Jusqu'où les habitants de ce bunker, civils ingénieux et ex-nazis, sont-ils allés pour inventer l'arme ultime ? Ont-ils réussi ? Et comment expliquer leur totale disparition du bunker, si ce n'est la mère du héros qui a réussi à s'enfuir ? N'ayez pas peur de descendre au plus profond des entrailles de la Terre pour lever le mystère qui entoure ce paradis perdu, car au final il vaut le coup d'œil.

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