Le courage et la peur
Qu'est-ce qui fait peur ? Vous allez fatalement vous poser la question en jouant à Resident Evil 3. Vous allez penser aux zombies bien sûr. Aux jump scares. Au Nemesis. Et vous aurez raison. Mais il reste un élément clef, indispensable, qui sépare les séries B des Triple A de l'horreur – ce que vous ressentez, ou pas, pour les protagonistes plongés en plein enfer. Du mépris ou de la haine pour les planqués qui tuent les autres pour survivre, comme dans le film Dernier train pour Busan. De la méfiance pour les blessés que l'épidémie va forcément métamorphoser. Du respect et de l'admiration enfin pour Jill Valentine, l'héroïne qui fait passer les autres avant sa propre sécurité. Celle qui va vous inspirer du courage à vous, joueur, quand elle vous forcera à affronter le Nemesis au lieu de le fuir. Celle que vous voudrez sauver à tout prix. Celle que vous aurez peur de voir souffrir ou pire : de voir mourir...
L'histoire
Le principe
Jill Valentine fait penser aux héroïnes de James Cameron.
Impossible de ne pas penser à Linda Hamilton ou à Sigourney Weaver quand on équipe Jill avant un duel en arène face au Nemesis. Impossible de ne pas penser au film Aliens de James Cameron quand Jill fonce dans une sous-station électrique remplie d'araignées qui ont recouvert les murs de sécrétions organiques. Ou encore quand elle lâche Carlos et une poignée de survivants pour affronter le Nemesis en tête-à-tête dans une séquence anthologique.
C'est dans ces moments-là que Resident Evil 3 révèle toute la richesse de son gameplay. Quand le survival horror flippant force le joueur à intégrer ses mécaniques d'esquive, à regarder le danger en face, à utiliser les limites de l'intelligence artificielle pour affronter le danger, et sa peur. Pour aller au combat, parfois avec un simple couteau, au lieu de fuir. Au lieu de vider des chargeurs sur les zombies. Au lieu de courir comme un dératé sans regarder où aller sur la carte. Le tout pour finir dans une impasse, s'y faire croquer, gâcher une herbe de soin, voire une sauvegarde. C'est dans ces moments que le joueur contrôle sa peur malgré la musique stressante, les râles, les portes ou les vitres sur lesquelles les zombies tambourinent sans relâche. Et qu'il est dans sa zone, calme, imperturbable, pressant les boutons mécaniquement avec un timing parfait, enchaînant les headshots et les kills comme une des créatures Apex d'Umbrella.
Le gameplay
Blesser les Hunters à la tête (même à mains nues !) révèle leur point faible. Sinon : grenade.
Quand vous serez prêts, vous pourrez tenter des esquives sur les ennemis les plus redoutables comme les boss. Vous prendrez plaisir à balancer une grenade aveuglante pour mieux viser la tête des Hunters et faire voler en éclats leur carapace frontale, avant d'attaquer le crâne et la chair à découvert. Vous lâcherez un sourire en voyant les dégâts qu'ils subissent lorsque Carlos leur met un direct en pleine mâchoire, à mains nues, avant de lever son fusil d'assaut CQBR upgradé pour les achever d'une rafale. Vous serez même capable d'esquiver les attaques redoutables du Nemesis en pleine rue, d'aligner quelques coups de fusil à pompe pour le sonner, voire de réussir une esquive parfaite et de lui placer un tir en pleine tête super classe en slow motion. Entraînez-vous. Persévérez. C'est au prix de nombreux échecs que vous ressentirez l'exaltation de l'enchaînement idéal – esquive, visée, headshot. Les meilleurs feront le run parfait, pliant le jeu en deux heures chrono (hors cinématiques). Oui, c'est court. Mais il faut des heures et des heures d'entraînement pour en arriver là. Voire l'aide de quelques bonus débloqués après avoir fini plusieurs runs.
Le multi
En multi, choisissez les bonnes combinaisons de cartes pour tuer les survivants.
Pour qui ?
Attention, certains ennemis peuvent vous tuer en un coup.
L'anecdote
Vous allez découvrir comment Marvin Branagh se fait bêtement avoir...
- Réalisation AAA : modélisations, animations, éclairages, musiques et bruitages au top
- Mise en scène digne de Naughty Dog
- Jill Valentine crève l'écran (Carlos moins)
- Le Nemesis fait le job, et plutôt bien
- Court, très court : entre 5 h et 7 h pour un premier run, voire 2 h pour les pros, hors cinématiques
- Il manque le beffroi, le parc, un boss, des monstres, etc. par rapport à 2000 (mais c'est plus joli et plus jouable)
- Le multi bancal – pourquoi pas plus de niveaux en solo, ou un mode coop à la place ?
Le remake de Resident Evil 3 est plus bancal que le précédent. Plus court, plus action, avec des niveaux entiers qui manquent à l'appel, handicapé par un multi anecdotique, il souffre à priori de la comparaison avec un Resident Evil 2 déjà bradé partout. A priori. Mais ce serait faire l'impasse sur une réalisation et une mise en scène hallucinantes qui tiennent clairement tête à un Uncharted 4 : A Thief's End, notamment en termes de modélisation et d'expressions faciales. Ce serait surtout faire l'impasse sur Jill Valentine, sur son courage, sur sa personnalité de femme forte qui se révèle face à l'horreur absolue incarnée par ce Nemesis cauchemardesque, déformé par ses mutations successives – humanoïde d'abord, alienoïde ensuite. Au jeu de la belle (avec un flingue) et de la bête, Resident Evil 3 place la barre très haut, au niveau des meilleurs films qui opposent des femmes à des monstres, du mythique Aliens de James Cameron en passant par les très efficaces Crawl d'Alexandre Aja, Us de Jordan Peele ou encore Sans un bruit (A Quiet Place) de John Krasinski. Certes le jeu est court. Mais pas plus que ces films qui soufflent l'angoisse et l'excitation, et dont les héroïnes mémorables nous inspirent un courage mêlé de peur.