La balade des pendus
- Éditeur Microids
- Développeur Pendulo Studios
- Sortie initiale 14 nov. 2019
- Genre Aventure
Les pendus reviennent à la mode, et c'est tant mieux. Comme le fabuleux Disco Elisyum, le jeu d'enquête Blacksad : Under the Skin remet les pendus à l'heure : à mi-chemin entre les Fables de Jean de la Fontaine et celles de Bill Willingham, vous allez vous balancer de fausses pistes en faux témoignages, ballotté par les mensonges des uns et des autres, à l'image du pendu sur lequel vous enquêtez. Comme disait le poète : « Puis çà, puis là, comme le vent varie, à son plaisir sans cesser nous charrie. »
L'histoire
Le principe
Observer les témoins permet de découvrir des indices à utiliser (ou pas) pendant la discussion.
Pas d'inventaire toutefois, ni de combinaisons farfelues d'objets, et c'est une bonne nouvelle : les joueurs qui se griffent le visage en repensant aux énigmes tordues des Monkey Island-like peuvent respirer. Dans Blacksad : Under the Skin, on se contente d'associer mentalement les indices entre eux pour aboutir à des déductions. Assez simples au début, ces déductions peuvent nécessiter la combinaison de trois voire quatre indices différents, et vous feront gamberger un moment. Le jeu triche un peu en ne vous donnant des indices clefs qu'à la toute fin du jeu, mais c'est pour le suspens et pour que vos déductions erronées, un coup à gauche, un coup à droite, rendent hommage au balancement des pendus.
Les QTE
Cette action est impossible à réussir. Vous reprendrez bien un écran de chargement ?
Certains suspects ont le sang chaud et vont vous attaquer : à vous de vous défendre en appuyant sur le bon bouton au bon moment, lors de Quick Time Event (QTE) inégaux. Certains QTE ne donnent pas d'indication claire à l'écran, ou alors trop tard : vous allez parfois vous manger deux-trois uppercuts, voire prendre une balle parce que vous avez sauté à droite et pas à gauche, avec un écran de chargement à la clef dans le pire des cas. Sans parler des choix perdus d'avance : n'essayez pas de sauter sur un ennemi armé, même s'il vous tourne le dos, même si vous le faites depuis une rambarde ou un toit, vous finiriez systématiquement chez le taxidermiste. Les sauvegardes automatiques sont heureusement nombreuses, mais vous obligent à revoir des animations et des dialogues que vous ne pouvez ni accélérer, ni zapper – frustrant.
Pour qui ?
La modélisation et les expressions ne font pas toujours honneur à la BD.
Pour les fans, dommage que la modélisation 3D et les animations faciales ne rendent pas justice au trait de Juanjo Guarnido. Blacksad est trop droit, rigide, impassible – on ne reconnaît pas la boule de nerf féline de Quelque part entre les ombres, notamment dans les duels à l'arme blanche si stylisés dans la BD, ou dans les fusillades. Même en colère, quand il fronce ses sourcils 3D, on a du mal à reconnaître sa rage des planches 2D. Si les reptiles sont impressionnants, Poli et Mitchell par exemple, tous les animaux à fourrure ont des traits grossiers, un problème récurrent même pour les jeux AAA (coucou les wookies de Fallen Order). On ne retrouve pas non plus son côté charmeur, vu que ce Blacksad de pixel est totalement asexué : pas d'actrice à séduire avec une rose entre les canines, pas de chatte écrivaine sexy à l'horizon, ce qui n'a pas empêché nos confrères de PC Gamer de s'étouffer dans leur puritanisme. Ce Blacksad trop lisse ne taquine pas non plus Weekly – l'humour est aux abonnés absents. Enfin la caméra souvent aux fraises (elle oublie parfois un travelling...) ne retrouve pas l'élan cinématographique des plus belles planches de la BD, celles détaillées dans le hors-série Les Dessous de l'enquête avec son hommage au Kingpin de Mazzucchelli. Et ce malgré quelques tentatives, comme le copié-collé des rues de New York à travers les stores du bureau de Blacksad. Le résumé de l'enquête sous forme de planches, avec un filtre cartoon, accentue le loupé : dommage, peut-être, que le jeu n'ait pas été en 2D.
L'anecdote
Poli a un rôle important dans Under the skin.
- L'enquête et ses fausses pistes
- Certains choix influencent l'histoire
- Les clins d'œil à la BD
- Un pendu et plein de cadavres
- Beaucoup trop de bugs
- Déplacements patauds, hit box mal dégrossies
- Modélisations 3D et animations pas à la hauteur de la BD
- Certains QTE punitifs, les flashbacks en temps limité
- Impossible de passer les dialogues déjà vus X fois
Quelle tristesse ! Blacksad : Under the Skin oscille entre bugs horripilants et moments de tension efficaces, modélisations bancales et personnages attachants, maniabilité lourdaude et déductions intéressantes, QTE horripilants et enquête passionnante, comme un pendu magnifique au bout de sa corde. Trop inégal, il risque de refroidir les fans de The Wolf Among Us qui n'avaient pas grand-chose à se mettre sous la canine depuis les soubresauts morbides de Telltale et qui attendent religieusement sa suite. Pour les plus courageux, toutefois, ou les plus affamés, ce Blacksad cache dans sa manche un dernier tiers passionnant, avec des surprises, des retournements, des drames, du sang et des larmes. Trop peu, trop tard.