Une belle tentative
"Le fils prodigue", voilà comment pourrait être qualifié Watch_Dogs en observant la manière dont Ubisoft en a pris soin. Nouvelle licence, nouveau système de jeu, quatre ans de travail acharné de plusieurs studios Ubi : l'attente était énorme. Et comme dit l'adage, "l'attente c'est 50 % du plaisir". Est-ce que les 50 % restants sont bel et bien dans le jeu ?
L'histoire
Après une mission d'introduction relativement simpliste, vous voilà totalement lâché dans la nature, ou plutôt la jungle urbaine qu'est Chicago. Les yeux béats devant la modélisation très impressionnante de la ville, un premier tutoriel vous indique comment pirater un mobile à distance pour intercepter un probable crime : vous devez intervenir. Seulement voilà, au milieu des innombrables icônes qui jonchent votre écran, vous découvrez de justesse une sorte de jauge d'approche laissant le temps à votre ennemi de vous repérer. Après l'avoir corrigé, vous changez de quartier : impossible d'utiliser votre mobile que vous venez d'apprivoiser. Pourquoi ? Comment débloquer cela ? Le jeu ne vous dira rien, jusqu'à ce que vous soyez suffisamment avancé dans le scénario pour comprendre le système des tours à pirater pour "libérer" le réseau.
Par une succession de petites frustrations, les premières heures de jeu ne sont pas les plus agréables. Nombreuses sont les missions que vous recommencez encore et encore, après des échecs dus à des objectifs imposés non respectés. Notamment dans les missions annexes où vous devez par exemple corriger un malfrat dans son QG : si ce dernier a le malheur de mourir sous le coup d'une grenade envoyée par un de ses acolytes, la mission est un échec. Et cela arrive bien plus souvent qu'on ne le croit.
Le principe
Après avoir nettoyé une zone ennemie, rien de tel que de laisser un petit message.
À la différence de Grand Theft Auto V, Watch_Dogs n'encourage pas l'utilisation frontale des armes, même si notre héros dispose d'un arsenal plus qu'impressionnant. Au contraire, observez l'environnement pour prendre l'avantage. Un brigand s'enfuit en courant ? Poursuivez-le et hackez une conduite de gaz pour le neutraliser dans sa course. Vous devez assiéger le repère d'une bande de voyous ? Utilisez les caméras de surveillance pour avoir une vue totale de la zone et déclenchez à distance leurs explosifs. Ce sont, au final, toutes ces actions qui créent l'intérêt du jeu.
Vous pouvez, en plus des possibilités offertes autour de vous, confectionner des gadgets capables de neutraliser des conversations ou un réseau, ou encore assourdir temporairement vos ennemis, le temps de vous glisser derrière eux et leur asséner un coup de bâton dans les rotules. Notez qu'Adam, en plus d'être un justicier vengeur et cascadeur hors pair, est également chauffeur-livreur à ses heures perdues. De la même manière qu'à pieds, lors d'une mission impliquant un véhicule, Adam peut modifier la couleur des feux de signalisation, lever un pont ou des bornes, provoquant ainsi un accident fatal à votre cible. Un timing parfait est requis pour immobiliser votre poursuivant, mais l'interface du jeu vous aide grandement à appuyer sur la touche au bon moment. C'est pas faute de pourtant le répéter : pour la sécurité de tous, pas de SMS au volant.
Le multi
Comme dans la vraie vie, les gens sont ennuyeux.
Si l'idée est séduisante et apporte une dynamique nouvelle dans l'approche du multijoueur, les premières fois, comme pour les missions solo, se passent dans la douleur. Les instructions ne sont pas des plus claires, et il n'est pas rare de voir votre ennemi courir bêtement dans la zone de jeu, tirer des coups de feu dans tous les sens, traduisant à l'écran son état d'incompréhension qu'il doit ressentir derrière sa manette. Mais une fois les objectifs acquis, une légère excitation vous gagne. Se cacher dans la foule, bloquer le hacking, ruser pour démasquer votre ennemi deviennent relativement grisantes dans cet environnement qui continue à vivre autour de vous. Outre le un contre un, un mode en équipe vous lance dans une guerre d'envergure, nécessitant coordination et contrôle.
Pour qui ?
Depuis sa moto, Adam bloque ses poursuivants trop coriaces.
Watch_Dogs s'adresse donc à ceux qui ont envie d'explorer une approche moins orientée action et plus axée sur l'enchaînement de petites actions à distance, pour parvenir à ses fins en restant vivant. Ce qui est déjà beaucoup.
L'anecdote
Lui il ne jouera plus à Rayman.
Dans tous les cas, vous serez globalement un peu perdu. Les missions annexes commencent à un point de rendez-vous mais sans aucune mise en appétit. Pourquoi devez-vous corriger ce bandit ? Vous n'en savez rien, vous connaissez juste son itinéraire ou le lieu de sa planque. Ils se ressemblent tous, ont tous la même façon de se battre, alors au bout d'un moment vous ne vous posez plus de questions et vous allez au charbon. Dommage, un peu de contexte et d'histoire auraient amené du liant dans cet ensemble qui peut paraître un peu décousu.
- Le monde ouvert, agréable à parcourir
- L'intervention des joueurs dans votre partie
- Il y a toujours quelque chose à faire dans le coin
- Le plaisir pris à hacker les objets une fois les principes compris
- Le manque d'encadrement du joueur et de contextualisation des missions
- Recommencer des missions suite à des morts bêtes
- Visuellement beau, mais pas non plus à couper le souffle pour de la next gen
- Répétitif
- Les clichés lubriques des informations sur les passants
Depuis son annonce à l'E3 2012, Watch_Dogs a su se faire désirer. Et les 50 % restants du plaisir ne sont pas forcément au rendez-vous. Watch_Dogs n'est pas un mauvais jeu, mais ça n'est pas non plus un très bon jeu. Sur le papier, il a pourtant un potentiel énorme. Si en démarrant l'aventure vous ne rêvez que de hacker plein d'objets ou de passants, profiter du système pour trouver des informations, détourner des usages, vous vous apercevez rapidement que, dans les faits, le jeu est extrêmement limité et les missions se suivent et se ressemblent. Faire diversion, détourner de l'argent, voler une voiture, activer des feux de signalisation... L'environnement de Chicago est très réussi et agréable à parcourir ; vous vous plairez à accepter une mission annexe au détour d'un carrefour. Mais l'excitation n'y est pas réellement. À quoi cela sert de connaître le profil des personnages si la seule exploitation qui en résulte est l'envoi de 3 SMS ? On est très loin de ce que, à sa manière, Deus Ex : Human Revolution avait pu apporter dans la réalisation de missions reposant sur l'étude comportementale des personnages.