Alerte rouge au soleil levant
- Éditeur SEGA
- Développeur Ryu ga Gotoku Studio
- Sortie initiale 9 nov. 2023
- Genres Action, Aventure
Récemment renommée Like a Dragon en Occident (afin de coller à l'appellation japonaise), la licence Yakuza semble peu à peu atteindre une sorte de plafond de verre. Avec The Man Who Erased His Name et le retour de son héros emblématique Kiryu Kazuma – qui, comme le titre l'indique, a changé de nom –, on peut effectivement se demander quel sera l'avenir de la saga phare de SEGA.
L'histoire
Sans grande surprise, le scénario de The Man Who Erased His Name se laisse suivre avec un plaisir relatif. Il convient de préciser que les ficelles de la série se voient de plus en plus, réemployant sans grand effort les archétypique éculés (le gangster gentleman, etc.), des situations ou même des lieux d'autrefois – une grande spécialité de la série. Alors ce n'est pas fondamentalement gênant, et certains continueront de défendre le côté malin consistant à essorer une recette jusqu'à la dernière goûte (de saveur ?), mais on ne peut s'empêcher de s'interroger sur l'avenir d'une licence qui peine à renouveler ses codes.
Car le seul truc à sauver – intellectuellement – de ce The Man Who Erased His Name, c'est peut-être ce côté "méta" malgré lui. L'histoire d'un homme qui n'arrive pas à se séparer de son passé, et celle d'une saga qui finalement traverse la même chose. Il faut "faire mourir Kiryu de nouveau", tout comme il faut conclure une énième fois des arcs narratifs devenus poussifs. C'est peut-être, d'une certaine manière, le fardeau des grandes œuvres populaires du XXIe siècle, de Dragon Ball à Star Wars.
Le principe
Heureusement, les cinématiques sont toujours au rendez-vous.
Pourtant, le titre tente tant bien que mal d'apporter un peu de nouveauté, avec l'intégration de gadgets tels qu'une montre permettant de paralyser les ennemis, voire de les projeter à la manière de Spider-man, ou encore des cigarettes explosives "à la James Bond". Tout cela semble finalement bien peu en comparaison du level design ou de mécaniques que les fans se coltinent désormais depuis 18 ans, qu'il s'agisse du gameplay à base de combos (et de coups spéciaux avec les éléments du décors), mais aussi de la répartition des points de compétences toujours aussi conventionnelle.
Reste alors les habituelles activités annexes. Si ces dernières sont nombreuses, elles sont là aussi reprises, pour la plupart, des épisodes antérieurs. Pas de quoi s'offusquer outre mesure, mais pas sûr que cela incite les adeptes à passer plus de temps qu'il ne faut dans cette aventure. Vendu à moindre prix et étant initialement prévu comme DLC pour le prochain volet à sortir (Infinite Wealth, dont une démo est fournie avec le jeu), The Man Who Erased His Name ne dure qu'une quinzaine d'heures. Ce n'est franchement pas plus mal, mais nous ne sommes pas encore assez cyniques pour voir cela comme un argument de vente.
Pour qui ?
Les gadgets facilitent énormément les combats.
L'anecdote
Pour ceux qui n'ont pas joué à la saga, Gaiden est une bonne porte d'entrée.
Toutefois, tout cela met aussi au grand jour des aspects toujours plus désuets de la licence. On pense évidemment à ces mallettes disposées ici et là, et contenant généralement des objets à revendre en boutique. Ou encore, justement, à la découverte d'Akame, sorte de femme de l'ombre nous demandant notre aide pour ses "affaires"... alors que l'on cherche encore, en soi, à sauver notre camarade Hanawa. C'est aussi dans ces moments que The Man Who Erased His Name nous rappelle son statut d'ancien DLC, avec des grosses ficelles à la limite du gimmick de remplissage.
L'astuce
Le genre de passage qui nous font dire que, sauf changements, la série a peut-être fait son temps.
- Cinématiques toujours agréables
- Peut-être une bonne porte d'entrée pour les néophytes
- Un côté "apéritif" qui peut plaire
- Un système de progression/compétences plutôt rapide et agréable
- Un rendu qui commence à vieillir (surtout hors cinématiques)
- Des combats qui peinent à se renouveler
- Des situations (scénario, game design, activités, etc.) déjà vues et jouées
- Une dissonance ludonarrative parfois salée
- La désagréable sensation qu'on désacralise une œuvre
The Man Who Erased His Name est malgré lui le symbole de la stagnation d'une licence devenue culte. Relativement joli mais ne parvenant plus à surprendre en raison de son moteur vieillissant, le titre s'essouffle aussi sur le plan conceptuel. Malgré son système de gadgets, il nous rappelle quelque peu les affres du temps : autrefois porte-étendard d'un certain réalisme et d'un contenu gargantuesque, Like a Dragon se mue petit à petit en une sorte d'exutoire routinier et toujours plus arcade. Rien de nouveau sous le soleil japonais diront certains, et c'est dans un sens vrai, mais cela interroge sur le fait que la saga – par le passé dans l'air du temps – n'évolue peut-être plus aussi vite que son genre... et que le médium. La formule continuera toujours de fonctionner auprès de certains, mais pour combien de temps ? Attention à ce que ce ne soit pas les joueurs qui aient envie d'oublier un nom jusqu'ici sacré.