La Légende du bout du monde
- Éditeur SEGA
- Développeur Ryu ga Gotoku Studio
- Sortie initiale 26 janv. 2024
- Genres Action, Aventure
Seulement quelques semaines après The Man Who Erased His Name, voilà que débarque le nouveau pendant RPG de la licence de SEGA. Yakuza : Like a Dragon avait été l'une des réussites de l'année 2020, et Like a Dragon : Infinite Wealth se devait de confirmer ce succès. Mission accomplie pour Ichiban Kasuga ?
L'histoire
L'un des points perturbants de ce Like a Dragon : Infinite Wealth, c'est que son introduction pouvait laisser augurer un épisode plus dramatique et audacieux. Au bout du compte, nous nous retrouvons avec le ton habituel de la licence. Non pas que ce soit un mal, mais nous avons quand même un peu l'impression d'un (petit) acte manqué, et d'une série qui ne se renouvelle plus à force de mêler histoires de yakuzas et Feux de l'amour.
Le constat est d'autant plus regrettable que le titre se refuse à passer un cap dans le réalisme, alors que certains sujets (pour le moins sérieux) auraient pu s'y prêter : secte, rapport à la maladie, infirmité... Bien que ce soit généralement justifié par l'histoire, il est dommage que quelques personnages (âgés, handicapés, etc.) se voient relégués au second plan et n'intègrent pas le panel jouable, ne serait-ce que ponctuellement. Le gameplay et l'ambiance du jeu s'y prêtaient, et cela aurait pour le coup insufflé un côté progressiste.
Même s'ils manquent parfois de diversité, certains nouveaux personnages ont de sacrés d'atouts.
La technique
Aussi excellentes que soient certaines séquences, les dialogues durent parfois quinze minutes.
Il y a malheureusement un souci : tandis qu'Hawaï était la promesse d'un dépaysement assuré, il faut avouer que la destination est plutôt décevante sur le plan visuel (et pas que). Bien sûr, avec ce nouvel endroit et à l'inverse de d'habitude, le studio n'a pas pu recycler tous ses modèles clés en main. Rien que le fait que la plupart des PNJ soient occidentaux parle de lui-même, tout comme la présence d'une plage (peut-être la vraie réussite de l'île), et on se doute que tout cela représente un certain boulot.
Le jeu est parfois très beau, voire magnifique.
Et cela vaut d'ailleurs pour l'écriture et le game design. C'est peut-être le gros problème du titre : il n'exploite jamais sa nouvelle destination, ou alors si peu. Nous pouvons certes évoquer certains mini-jeux comme éventuelles exceptions (ou la possibilité de saluer n'importe qui dans la ville — mouais), mais le sentiment général persiste, si bien que l'expérience aurait pu se dérouler sur les côtes japonaises que nous n'aurions pas vu grandes différences. À croire qu'Hawaï n'était là que pour intégrer quelques modèles de chemises hawaïennes.
Le principe
À d'autres moments, Hawaï déçoit un peu esthétiquement.
Infinite Wealth laisse de temps en temps la désagréable impression de vouloir tenir le joueur par la main. C'est dans certains cas agaçant, surtout que ce n'est que rarement justifié — aussi bien par le scénario que sur le plan artistique. Tandis que nous aurions pu espérer voir Ichiban profiter de sa première destination hors du Japon, nous retrouvons tous les gimmicks (parfois insupportables) de la saga — comme ces sempiternelles interruptions à chaque coin de rue, nous faisant rencontrer des PNJ bavards qui nous proposent des missions secondaires. Se rattachant à un genre plutôt libertaire, Infinite Wealth a donc ce paradoxe de livrer une expérience assez liberticide. Un constat qui évidemment s'améliore au fil de l'aventure (surtout après 25h de jeu), mais la longueur de cette dernière tend alors à rappeler que la série — à l'instar des productions d'Ubisoft — a toujours eu tendance à faire du remplissage sous couvert de générosité.
Le contenu
Vous déplacer vous permet de choisir l'angle des attaques, et donc de toucher plusieurs ennemis.
On parle ici d'un titre de gestion qui s'étale facilement sur une vingtaine d'heures, dont l'expérience peut être partagée en ligne (vous pouvez parcourir l'île des autres joueurs), et auquel il faut ajouter ensuite les habituelles activités de la licence : fléchettes, sessions de karaoké, courses, combats de sujimons (adversaires que l'on capture et répertorie comme dans l'épisode de 2019)... Entre tout ceci, et le fait de pouvoir multiplier les jobs pour nos personnages, c'est donc aisément une centaine d'heures qui attend le joueur qui souhaite vraiment s'investir dans ce volet.
Pour qui ?
Nous retrouvons la plupart des activités de la licence. Ici le karaoké.
Bien que des défauts restent agaçants, il faut avouer que nous avons toujours affaire à une expérience que l'on qualifiera de « qualité supérieure », sans commune mesure avec des titres parfois plus secondaires et qui pullulent depuis une quinzaine d'années. Sachez d'ailleurs que même votre serviteur, qui n'a pas spécialement apprécié The Man Who Erased His Name et qui a aussi des reproches à faire à Infinite Wealth, s'est petit à petit fait cueillir par ce nouvel épisode tant le côté gargantuesque (et le travail de précision) nous assomment et fait office de rouleau compresseur.
Enfin, il est (peut-être) quand même préférable de jouer à Yakuza : Like a Dragon avant de s'essayer à ce volet. Non pas pour des raisons scénaristiques — honnêtement, contrairement à ce que certains fans diront, il est possible de suivre cette histoire sans connaître le reste de la série —, mais plutôt pour savourer la progression en matière de système. Toutefois, comme nous venons de le dire, chacun peut faire à sa guise : les enjeux de cet épisode "best of" étant facilement compréhensibles, il est tout à fait possible d'en profiter en tant que nouveau venu.
L'astuce
Avec Infinite Wealth, pas d'histoire de plagiat concernant les designs des Pokémon !
- Parfois beau
- Le tout début de l'aventure, plutôt malin, et une narration parfois ambitieuse
- Quelques moments forts et bien sentis
- Une mise en scène souvent incroyable
- Dondoko Island, un (bon) jeu à part entière
- Quelques activités amusantes, et toujours au poil niveau gameplay
- Des combats toujours dynamiques et réussis, avec plus de profondeur
- Des jobs originaux et qui font... le boulot
- Hawaï, graphiquement un peu décevante
- La désagréable impression de ne pas souvent être à Hawaï, mais plutôt dans Yakuza x Hawaï
- Un jeu déséquilibré, avec un début poussif
- Trop bavard ?
- Un scénario qui ne sort que rarement du ton habituel de la série
- La sensation que l'aventure est parfois en mode téléguidé
- Dommage qu'il n'y a pas plus de nouvelles têtes jouables (et aux designs plus variés)
Difficile de juger ce Like a Dragon : Infinite Wealth. D'un côté, certains systèmes ont été perfectionnés. Néanmoins, là où l'épisode d'il y a quatre ans était plutôt bien rythmé, ce nouveau volet met du temps à démarrer. Surtout, nous retombons un peu dans les travers de la série, et cela se reflète jusque dans l'aspect graphique : impeccable quand on parcourt les anciens environnements, et devenant plus quelconque (mais parfois aussi magnifique) une fois qu'Ichiban met les pieds à Hawaï. On se demande alors quel est le but de cette nouvelle destination qui ne justifie jamais réellement son existence. Malgré un côté téléguidé parfois fatiguant, il faut saluer la générosité absolument démentielle de l'ensemble, et la façon dont tous les pans d'Infinite Wealth s'imbriquent les uns dans les autres pour servir une cause globale (un peu comme la solidarité dont font preuve les personnages). En observant la profondeur de l'expérience, nous avons l'impression d'avoir affaire à un travail d'orfèvre tant chaque mécanique, chaque activité et (même) chaque statistique paraît faire sens et se nourrir des autres. Honnêtement, voici un savoir-faire qui, lorsqu'il est exécuté de la sorte, semble unique.