Ambitieux, trop ambitieux
- Éditeur Reef Entertainment
- Développeur Teyon
- Sortie initiale 15 nov. 2019
- Genres Action, First Person Shooter
Dans le futur de Terminator : Resistance, l'intelligence artificielle Skynet commence la fabrication des premiers assassins cybernétiques à apparence humaine, les T850. Leur but ? Infiltrer les poches de résistance sans se faire repérer. C'est ce que Terminator : Resistance essaye de faire avec la ludothèque des joueurs, en copiant des jeux de rôle comme Fallout 4 et des FPS comme Battlefield V, rien que ça – mais avec un centième de leur budget. La comparaison avec les tauliers du genre va ruiner cette tentative, brûlant des tissus humains trompeurs pour révéler un endosquelette trop robotique et des microprocesseurs rudimentaires.
L'histoire
Le principe
Réfléchissez-bien : Erin va mourir si vous choisissez la mauvaise réponse.
Vous avez aussi des dialogues à choix multiples avec des survivants qui racontent leur vie ou réclament une babiole – un poste de radio pour Ryan, un chiot pour Patrick. Avec des petits cœurs pour certaines répliques, et les mentions « Jennifer a aimé ça » façon Telltale si vous faites preuve d'empathie... Il est même possible de vivre des romances et de coucher avec des PNJ. Les fans aguerris de FPS lèvent déjà leur sourcil de catcheur à la Dwayne Johnson : des romances ? dans un jeu d'action ? Ce n'est pas tout : en fonction de vos réponses, vous aurez droit à des fins différentes, avec plus ou moins de cadavres (et autant de remords) sur la conscience. Incroyable pour un FPS, et encore plus pour un jeu Terminator. Il ne manquerait plus qu'un jeu de stratégie/tactique dans l'univers de John Wick et... OK, vivement que 2019 se termine.
Le gameplay
Impossible de courir ou de tirer avec cette vue – heureusement, c'est déjà assez cheaté comme ça.
Les niveaux le permettent souvent, comme cet entrepôt où vous pouvez faire exploser un mur, escalader un camion ou crocheter une porte pour atteindre votre objectif. Ou cette maison avec huit Terminators dans les collines d'Hollywood, que vous pouvez truffer de pièges laser. Au bout de quelques heures, le jeu trouve son rythme entre camps de résistants pour faire connaissance avec les PNJ et accepter leurs quêtes annexes, exploration de cartes ouvertes avec objectifs multiples, et missions très scriptées où il faut courir et combattre au milieu de soldats de la résistance – les plus charnues du jeu et de loin, surtout les toutes dernières. Terminator : Resistance donne presque l'impression de prendre le meilleur d'un Fallout 4 avec skills, crafting, upgrades d'armes, dialogues, quête principale, quêtes secondaires et fins multiples, tout en restant un bon gros jeu d'action avec quelques missions linéaires où tout pète dans tous les sens (éboulements de murs ou de ponts à la Battlefield V compris). Pour les développeurs, c'était sans doute trop de tissus vivants à coller sur un endosquelette fragile. Trop de complexité pour leur budget... et pour leur moteur de jeu.
Les défauts
Tirez dans la tête du T-47 Plasma pour le sonner et mettre à nu ses points faibles.
Où est passé le jeu de survie promis par les premières missions, entre crafting et infiltration ? Où est la peur de mourir et de recharger sa partie (45 secondes de chargement minimum sur PlayStation 4 Pro, la meilleure des motivations) ? Il aurait fallu ne garder que les sauvegardes manuelles, celles qu'il faut dénicher dans certaines pièces protégées à la Resident Evil 2 Remake, pour ajouter un peu de suspense. Dernier clou dans le cercueil du rôliste en herbe : les composants ramassés sur les T800, T850 et T-47 calcinés rapportent beaucoup trop d'argent. De quoi acheter munitions et accessoires à volonté dans votre camp, en plus de tout ce qu'on récupère sur le champ de bataille. Chaque placard, chaque impasse regorge de loots, ce qui casse la crédibilité de cet univers post-apocalyptique soi-disant peuplé de scavengers affamés. Sous son masque de chair, l'endosquelette trahit un équilibrage aux fraises.
Pour qui ?
Les HK Tanks sont redoutables. Contournez-les pour viser leur réacteur et les détruire.
Quid des fans de James Cameron alors ? Les références aux deux premiers films sont nombreuses, du plus anecdotique (baptiser un chiot Max ou Wolfie) au plus impressionnant (rencontrer John Connor). La modélisation des T800, des HK Aerial et surtout des HK Tank est fabuleuse, et la musique des films donne des frissons. Mais même là, la réalisation bancale aura du mal à passer. Les niveaux de nuit font vraiment illusion avec leur brouillard qui masque la pauvreté des textures, plonge les décors dans la pénombre et diffuse une lumière bleue spectrale que n'aurait pas renié James Cameron. De jour par contre, ça pique : textures rudimentaires et floues, éclairages basiques, on a du mal à se croire sur PlayStation 4. Certaines textures qui devraient être dans l'ombre, sous un train par exemple, sont éclairées comme en plein jour ; tandis qu'en cas d'explosion, la lumière fait un halo uniforme au sol sans tenir compte des murs adjacents – le sol est parfois jaune et le mur d'à côté noir. On ne demande pas du ray tracing à tous les étages, juste le minimum syndical sur cette génération de consoles. Sans parler de ce qui remplit jusqu'à un sixième voire un tiers de votre champ de vision : votre arme et votre bras, pauvres en détails et en animations. On est loin, très loin d'un Metro Exodus et de ses araignées qui courent sur les manches. Terminator : Resistance joue plutôt dans la même cour que Killzone : Shadow Fall, le premier FPS sorti sur PlayStation 4 en... 2013.
- Beaucoup de clins d'œil à Terminator 1 et Terminator 2
- L'alternance entre cartes ouvertes et missions en escouades ultra scriptées à la Call of Duty
- L'ambiance de nuit, la modélisation très réussie des T800, HK Aerial et HK Tank
- Un vrai effort sur les dialogues, le lore, le scénario et les conséquences de vos choix à la fin
- Des graphismes dignes de 2013 pour les missions de jour
- Manque de punch et de recul des armes, déplacements ultra lents
- Aucun challenge à cause du wallhack et du fusil plasma R95
- Campagne solo qui se platine en 10 heures
- Plusieurs cartes sont recyclées (de jour, de nuit)
- Pas de multijoueur
- Ralentissements et chargement longuet : 45 secondes minimum sur PlayStation 4 Pro
- Vendu plein prix face à une concurrence féroce
L'avantage des FPS ratés, c'est qu'ils permettent de mieux comprendre le succès des FPS réussis. Terminator : Resistance accumule les surcouches de chairs trompeuses, entre jeu de rôle (dialogues, compétences), et survie (infiltration, crafting). Des illusions qui ne tiennent qu'une heure et demie sur les dix nécessaires pour platiner le jeu. Ce Terminator : Resistance oublie de se concentrer sur l'essentiel : un gameplay nerveux, un squelette robuste. Dans ce créneau hyper concurrentiel, bac à sable de toutes les innovations technologiques (coucou le ray tracing de Metro Exodus et de Battlefield V), il faut du cran pour sortir en même temps que Call of Duty : Modern Warfare. Le faire avec un gameplay et une réalisation cassés, sans multijoueur mais au même prix, ce n'est plus de l'infiltration. C'est du suicide.