Test | Tomb Raider Chronicles
05 déc. 2000

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Tomb Raider Chronicles

"Petit Papa Noël, quand tu descendras du ciel, avec tes jouets par milliers, n'oublies pas... le nouvel épisode de Tomb Raider !". C'est devenu une habitude : la (trop ?) célèbre Lara Croft nous revient pour la période des fêtes, ces instants magiques où les bourses sont plus à même de se vider, sans véritablement se soucier de la qualité des produits achetés... Mais qu'en est-il vraiment de ce cru 2000 ? Réponses tout de suite.

Lara is dead !

A force de jouer les pilleuses de tombeaux sacrés, ce qui devait arriver un jour est finalement arrivé : Lara Croft se retrouve coincée sous une énorme pyramide. Et si elle a toujours affiché une aisance déconcertante à pousser des blocs de pierres de plusieurs tonnes, elle aura, cette fois-çi, beaucoup de mal à se tirer de ce mauvais pas. Ses proches la considèrent d'ailleurs comme définitivement perdue puisque, faute de corps, ils ont même élevé un monument à sa mémoire. TR5 débute donc là où TR4 s'était terminé, comme quoi, chez Core Design, on s'attache enfin à respecter un minimum de logique dans le déroulement de la série. Après un service funèbre forcément pluvieux, les plus proches amis de Lara regagnent le manoir Croft. Dans le petit salon de la demeure victorienne et autour d'un thé sans doute coupé au whisky, ils se remémorent, à tour de rôle, les aventures passées de leur chère disparue.

Retour vers le passé

Ces émouvants souvenirs partagés au coin du feu sont donc le prétexte pour introduire chacun des quatre principaux niveaux. Même s'il n'existe aucun véritable lien entre eux, le déroulement de l'histoire apparaît bien plus cohérent que dans TR3 (où l'on sentait bien que le scénario avait été fait après la conception des niveaux…). S'il est aussi là pour nous rappeler, si besoin est, que Lara a finalement pas mal bourlinguer, l'objectif de ce scénario est, avant tout, de proposer au joueur un large éventail d'environnements et donc de situations. Dans cet épisode, vous allez pouvoir faire beaucoup de choses, en tous cas, beaucoup plus que d'habitude. Fini les blocs à pousser ou les leviers à tirer. Grâce à ce scénario astucieux, le gameplay de TR5 possède un spectre très étendu.

Exhumation

Lara Croft sort des ses tombeaux poussiéreux et autres monuments antiques pour visiter des lieux qui, s'ils ne sont pas forcément plus modernes, ont au moins l'avantage d'être plus variés. On va évidemment retrouver quelques vieilles pierres, notamment dans le premier niveau qui se déroule dans les rues de Rome, mais la suite nous réserve plus de surprises : une base russe et son sous-marin qui prend l'eau, une île irlandaise et ses étranges occupants sortis tout droit d'un conte pour enfant, pour finir avec un immeuble high-tech digne d'un Mission : impossible. On s'éloigne de plus en plus de l'archéologie, c'est vrai, et les anciennes méthodes à la Indiana Jones sont vite remplacées par la technicité d'un James Bond. Mais, après tout, pourquoi pas ? Même si tout cela n'a finalement plus grand chose à voir avec le nom de la série...

Armes au placard

La plus grosse nouveauté de cet épisode, c'est l'utilisation très limitée des armes à feu. Exit l'arsenal conséquent des aventures précédentes. Dorénavant, Lara préfère la discrétion d'un fusil sniper aux effets dévastateurs, mais plutôt bruyants, d'un lance-grenades. Si les deux célèbres revolvers sont, bien sûr, toujours de la partie, un mouchoir imbibé de chloroforme et une infiltration silencieuse vont le plus souvent les remplacer. De toutes façons, Lara va être désarmée à plusieurs reprises. Elle devra alors compter uniquement sur votre matière grise pour progresser, comme sur l'île irlandaise du troisième niveau, par exemple, où elle n'est encore qu'une adolescente sans défenses… apparentes. Sans égaler l'exhaustivité d'un Metal Gear Solid, ce nouvel aspect apporte à la série une bouffée d'oxygène bienvenue.

Des atmosphères de choix

Chacune des quatre aventures du jeu bénéficie de sa propre ambiance, le tout amplifié par des qualités graphiques indéniables (réussir à obtenir un rendu pareil avec un moteur aussi vieux relève carrément de l'exploit). Passons sur le premier niveau, les rues de Rome, qui n'a rien de très dépaysant (il a tout de même le mérite de faire intervenir Larsen, un personnage qui apparaissait dans le premier TR). La base sous-marine du deuxième niveau, par contre, donne l'occasion au joueur d'apprécier des effets climatiques (chutes de neige) et physiques (arcs électriques provenant de câbles rompus) particulièrement réussis. La troisième aventure, sur une île irlandaise, se révèle d'autant plus envoûtante qu'elle est à milles lieux de ce à quoi on était habitué avec la série : fantômes, pendus, spectres, fées et autres farfadets. Quant au dernier niveau, très high-tech, préservons la surprise...

Cinéma pop-corn.

Pour lier un peu tout ça, le jeu est évidemment entrecoupé de nombreuse cinématiques. Ces-dernières utilisent le plus souvent le moteur de jeu. Si ce n'est pas toujours un avantage, elles permettent de donner du relief au scénario. Les rebondissements vont bon train et sont beaucoup moins prévisibles qu'auparavant. Les niveaux sont, quant à eux, liées par des scènes en images de synthèse signées Ex-Machina, une société française qui n'a plus à faire ses preuves dans ce domaine (on leur doit notamment les sympathiques pubs Seat mettant en scène Lara Croft). En faisant appel à eux, Core Design a fait un excellent choix puisqu'en plus d'apporter leur savoir-faire technique (ces séquences sont très bien léchées), ils insufflent au jeu un second degré pour le moins surprenant. On n'est souvent pas très loin de la caricature et c'est drôlement agréable.

TR neuf ? Non, cinq...

Voilà la grande question que l'on se pose à chaque nouveau Tomb Raider : "Qu'est-ce que cet episode va apporter de neuf ?" Et voici sans doute la réponse la plus rapide qui nous est faite, à coup sûr : "Pas grand chose". A ce "pas grand chose", il serait bon, cette fois, d'y ajouter un " ...de révolutionnaire". Avec TR5, on ne peut pas nier que la série n'évolue pas. Au contraire, si le moteur n'a quasiment pas changé d'un iota, le gameplay bénéficie d'une amélioration très appréciable. Les actions à réaliser sont ainsi plus nombreuses et laissent au joueur une sensation de liberté plus importante. En fait, au cours de notre progression dans le jeu, on a souvent le sentiment qu'il s'élargit, grâce à la diversité des situations, mais aussi au nombre impressionnant de personnages différents que l'on va être amené à rencontrer.

Petits nouveaux.

Sans être forcément anecdotiques, TR5 dispose d'autres nouveautés intéressantes. L'inventaire a été optimisé pour augmenter le nombre de combinaisons entre les objets. Lara peut en utiliser de nouveaux comme un casque à infrarouge (qui lui permettra de détecter les rayons laser autrement invisibles) ou bien encore un lance-grappin pour franchir les précipices trop larges. Sur le plan camp adversaire, l'assortiment des nouveaux ennemis est, lui aussi, plutôt varié : soldats, snipers, gladiateurs, hommes en noir, dragons, hélicoptères, cavaliers maléfiques, hommes bioniques, etc. Finissons cette revue des nouveautés par l'amélioration relative de l'intelligence des ennemis. Rassurez-vous (sic !), rien d'extraordinaire : ils réagissent maintenant vraiment au bruit, déclencheront l'alarme avant de vous canarder ou se replieront quand vous tenterez de les piéger à distance.

Bouge ton corps!

Que serait un vrai Tomb Raider sans son lot de nouveaux mouvements ? Pour justifier l'utilisation du même moteur depuis maintenant 5 ans, Core Design a bien entendu doté Lara de quelques aptitudes supplémentaires. La baroudeuse peut désormais jouer les équilibristes sur une corde tendue pour traverser des précipices, mais aussi les gymnastes, en tournoyant autour d'une barre pour rejoindre des endroits jusqu'alors inaccessibles. Autre nouveauté : la possibilité d'ouvrir des coffres, de fouiller des tiroirs et des armoires. Concrètement, ses ajouts se traduisent par une interactivité avec l'espace plus importante et, accessoirement, permettront sans doute à Lara Croft de briguer la place du personnage de jeu vidéo le plus agile qui soit. Mais cette agilité est un peu desservie par une jouabilité en dents de scie.

La précision au millimètre...

C'est apparemment l'un des défauts majeurs de la série, un défaut que ses détracteurs n'omettent jamais de montrer du doigt : Lara, capricieuse, est difficile à contrôler. Cet épisode n'échappe donc pas à la règle. Si le problème existe, il n'a rien de vraiment handicapant. N'oublions pas que Tomb Raider est une série "grand public" avec tous les bons (et les mauvais) côtés que cela sous-entend. Les sauts, par exemple, doivent être appréhendés avec attention pour éviter les chutes. S'accrocher à une corniche demande toujours autant de précision et un timing bien étudié. Mais le fameux tutorial, grâce auquel on apprenait à diriger Lara Croft, est encore disponible. Cette fois, il est totalement intégré à l'histoire, au tout début du premier niveau.

Les vrais défauts

Pour trouver les défauts les plus importants, il faut chercher ailleurs et surtout du côté du moteur du jeu. Vous ne chercherez pas très longtemps car ils sautent naturellement aux yeux. Si graphiquement, le jeu s'en sort très bien, la numérisation des personnages secondaires est nettement moins impressionnante. Mais on savait qu'à ce niveau, c'est l'héroïne qui retenait toute l'attention des développeurs. Pourtant, Lara continue à entretenir une relation étrange avec les décors : un bras qui disparaît derrière un mur, des pieds cachés par des marches d'escaliers. Bref, il ne faut pas s'attendre à des miracles sur ce point, puisque les épisodes précédents nous avaient déjà habitués à ce genre de maladresses. Sans la conception d'un nouveau moteur, elles restent difficiles à corriger.

Tomb Raider en kit

Comme prévu TR5 est livré avec un éditeur de niveau (une exclusivité PC), preuve que Core Design a définitvement abandonné l'idée de continuer à utiliser ce moteur vieillissant. En offrant la possibilité aux joueurs de créer leurs propres aventures, ils assurent à la série, sous cette forme, une durée de vie plus conséquente. S'il se produit la même alchimie que pour Half-Life, par exemple, on devrait voir proliférer sur le net des niveaux originaux et plus surprenant encore que ceux proposés par les développeurs. C'est bien connu : les joueurs sont en général plus créatifs (notamment grâce à leur recul et l'absence de pression extérieure…). Eidos a d'ailleurs prévu de mettre régulièrement à disposition des nouvelles textures pour faire progresser cet éditeur de niveau. A l'utilisation, ce-dernier apparaît comme assez intuitif ou, en tous cas, pas plus compliqué que la majorité des logiciels de ce type. Il est fourni avec un manuel très complet (et en français !) qui facilitera grandement votre apprentissage.

La relève

Inutile de faire durer plus longtemps un suspence qui n'en est pas vraiment un : Lara Croft n'est pas morte. La série Tomb Raider, par contre, va s'achèver avec cet épisode. Les possibilités offertes par les nouvelles consoles 128 bits (TR est avant tout développé pour ces plate-formes) vont enfin permettre à Core Design d'être plus gourmand. Un nouveau moteur, un rendu graphique supérieur, ce sont toutes les promesses qui nous sont faites pour les prochaines aventures de Lara Croft sur PS2. Mais, après 5 ans, on est tout de même en droit d'éxiger un minimum de nouveautés sur le plan technique. Si Core Design parle de "révolution", on a du mal à croire qu'elle pourra être aussi importante que celle provoquée par le tout premier épisode, d'autant plus qu'aujoud'hui, il existe une concurrence beaucoup plus aggressive sur ce même créneau. Qui vivra verra.
Les Plus
  • Un scénario très astucieux
  • Un gameplay à large spectre
  • Des ambiances de choix
  • Des textures impeccables
  • Le parti pris "infiltration"
  • Un second degré rafraîchissant
  • La profusion des personnages
  • Un doublage de qualité
Les Moins
  • La numérisation des personnages
  • Les éternels bugs d'affichage
  • La faible durée de vie
Résultat

Pas besoin de beaucoup d'objectivité pour apprécier à sa juste valeur le savoir-faire de Core Design. Ils disposent, depuis le début, d'un concept très fort qu'ils ont su utiliser avec bonheur. Le plus souvent... Mais on peut légitimement regretter la surexposition du personnage de Lara Croft, dans des domaines qui n'ont pas toujours à voir avec le jeu vidéo. Dans ces conditions, il n'est pas évident de juger cette série pour ce qu'elle est réellement, et non pas pour ce qu'il est de bon ton d'en penser. On s'amuse avec ce nouvel épisode, au gameplay plus complet que les précédents et avec de belles idées scénaristiques (le niveau sur l'île irlandaise est un pur moment de magie), et c'est bien là l'essentiel. Techniquement, Core Design aurait eu du mal à aller plus loin avec le moteur qu'ils utilisaient jusqu'à présent. Tomb Raider Chronicles clôture donc, avec pas mal de malice et de brio, la série telle qu'on la connaît actuellement.

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