Entretien avec Chris Davis
The Escapists est l'un de nos jeux indépendants préférés de ce début d'année 2015. Comme nous avons de la chance, Chris Davis ne s'est pas échappé quand nous lui avons proposer de répondre à quelques questions sur son jeu.
"Intégrer un scénario aurait changé la saveur du titre."
Qui êtes-vous ?
Chris DavisHey! Je suis Chris Davis alias Mouldy Toof Studios, le développeur de The Escapists.
Comment et quand avez-vous eu l'idée de faire un jeu comme The Escapists ?
C.D.Plusieurs choses ont rendu cela possible. Je pense qu'à l'époque, je devais regarder une série se déroulant dans une prison et je me suis dit : "pourquoi cela n'a jamais était adapté correctement en jeu ?”. Il y a aussi eu Skool Daze, un titre auquel je jouais souvent sur ZX Spectrum. Même s'il ne se déroulait pas dans une prison, il y avait déjà l'idée de routine et d'évasion au sein d'un environnement ouvert.
Pourquoi n'y a-t-il pas de scénario dans The Escapists ? Est-ce un choix artistique ?
C.D.Intégrer un scénario aurait changé la saveur du titre. Je voulais que le jeu laisse une part de hasard, et qu'il vous donne le choix de décider comment vous allez vous échapper plutôt que de vous guider avec une histoire qui vous indiquerait le chemin.
De nos jours, le divertissement est Roi. Avez-vous hésité à incorporer le côté ennuyeux et routinier de The Escapists ?
C.D.Une prison sans son aspect routinier ne serait pas une prison. Je pense que l'idée est de tourner cela à l'avantage du joueur. Par exemple, un nouveau joueur peut penser que le déjeuner consiste simplement à attraper un plateau et s'asseoir jusqu'à ce que la cloche sonne, mais c'est une bonne opportunité pour parler aux autres détenus et augmenter sa réputation, ou encore pour marchander ou accéder à leurs requêtes.
"Tout le monde est libre d'apprécier différents styles de jeu."
Est-ce que cela vous rend triste de voir que des personnes ne comprennent pas l'importance de ce genre de concept ?
C.D.Non, cela ne me rend pas triste. Tout le monde est libre d'apprécier différents styles de jeu (y compris moi) et je respecte ça. Le public auquel le jeu final s'adresse est très différent de celui auquel il se destinait au début.
Certaines personnes ont critiqué la version PC du jeu, disant qu'elle était inférieure esthétiquement à la mouture Xbox One. Comprenez-vous cela et pouvez-vous expliquer votre choix ?
C.D.J'ai développé la version d'origine sur PC, et Team17 a commencé à travaillé sur la mouture One à la moitié du développement. Ils ont augmenté la résolution du titre original car le style pixelisé ne convenait pas vraiment aux grandes TV. De même, le HUD a été revu pour être en adéquation avec la nouvelle configuration des touches. Même si certains préfèrent la version Xbox, ce n'est pas le cas de tout le monde. Les deux camps ont fait connaitre leurs opinions. La version PC a ses propres avantages exclusifs, comme l'éditeur communautaire ou la compatibilité avec Steam.
"Quand j'ai ajouté The Escapists, celui-ci a atteint le pallier en 48h. C'était dingue."
Avez-vous pensé à inclure un mode multijoueur ? Avez-vous une idée de ce que cela aurait pu donner ?
C.D.Cela a beaucoup été évoqué, et j'aurais vraiment aimé faire ça. J'avais dit sur Kickstarter que je regarderai les possibilités qu'offrait le moteur pour faire une telle chose. Rien qu'un mode coop' aurait été fun, un mode dans lequel on aurait pu collaborer avec un groupe de potes pour exécuter un plan d'évasion à plusieurs.
Avez-vous une anecdote intéressante ou amusante au sujet de développement du jeu ?
C.D.Hmm, laissez-moi réfléchir... Disons, la vitesse à laquelle cela s'est passé sur Greenlight (NDLR : un système de sélection communautaire sur Steam) était très intéressant. Chaque mois, Steam met en concurrence de très nombreux jeux et tout se décide en fonction des votes et de la popularité. Mon précédent jeu était resté un an sur la plateforme, tout cela pour collecter des votes en attendant de passer le cap. Je savais que le processus était long. Toutefois, quand j'ai ajouté The Escapists, celui-ci a atteint le pallier en 48 heures. C'était dingue.
Y a-t-il une fonction que vous vouliez inclure dans le jeu mais que vous avez dû abandonner en cours de développement ?
C.D.Il y eu quelques idées qui ont dû être mises de côté, sinon le jeu n'aurait jamais été fini. L'une d'entre elles était la présence de postes de gardes durant la journée. On aurait vu les gardes quitter les tours et marcher jusqu'aux bâtiments ; et on aurait pu utiliser ces pauses à notre avantage, pour frapper le garde ou plus simplement pour partir pendant que la tour était vide.
"Je laisse les grands garçons faisant des AAA entre eux."
Les jeux indépendants sont populaires depuis l'avènement de la digitalisation. Au fil des années, les jeux originaux se font de plus en plus rares (même sur ce secteur). Pensez-vous que le manque d'argent favorise toujours la créativité ?
C.D.Je ne sais pas trop. Pour certains, le manque d'argent donne sûrement plus de motivation pour réussir. Cela dépend vraiment des personnes : certains travaillent mieux sous pression et d'autres non. Cela devient de plus en plus difficile de percer avec des idées originales... Le marché est si saturé que les concepts uniques et le fait de réussir à les intégrer à un jeu deviennent rares.
Depuis plusieurs années, les joueurs opposent souvent les jeux AAA et les titres plus petits. Mais est-ce qu'un petit développeur comme vous aspire à créer de gros jeux ? Ou préférez-vous "l'intimité" et la "liberté de l'indépendance ?
C.D.La frontière entre les deux devient de plus en plus floue. Minecraft peut être classé comme un jeu indé, mais il est plus gros et brasse plus d'argent qu'aucun AAA ne pourrait l'espérer. Personnellement, je suis juste heureux de faire mes propres projets indépendants, et je laisse les grands garçons faisant des AAA entre eux.
Pour finir, quels jeux avez-vous aimé récemment ?
C.D.J'essaie encore de rattraper mon retard, mais je compte jouer un peu plus à Xenoblade Chronicles 3D et Majora's Mask 3D sur ma 3DS. J'aime aussi rejouer à mes vieilles consoles – Megadrive, Nintendo 64, Dreamcast... J'ai l'embarras du choix.