Pas évident de s'attaquer au monument que représente aujourd'hui la saga Resident Evil dans la culture populaire. Et pourtant, Third Editions s'en tire pas trop mal. Dans cet ouvrage qui se dévore à pleine dents, les auteurs dressent le panorama presque encyclopédique des titres de la saga jusqu'à l'épisode 6, incluant ses dérivés non numérotés, ses portages, ses films d'animation, ses livres...
Si ça n'est un secret pour personne, les développements laborieux des différents titres (jusqu'à 4 moutures pour Resident Evil 4) ont marqué les différentes équipes chez Capcom, usant jusqu'à l'écœurement bon nombre de talents. Cela n'a pas empêché la série de proposer des succès, jusqu'à un trop plein marqué par Resident Evil 6, jugé trop large, trop ambitieux, mais soulignant également l'accumulation des références et clins d'œil de Capcom envers l'industrie culturelle au sens large depuis 20 ans. Resident Evil a-t-il perdu son âme au fil des épisodes ? Le livre traduit avec justesse le fragile équilibre entre ce qui faisait la force du premier épisode (son inertie, ses mouvements et plans volontairement bloqués) et la frustration des joueurs (la possibilité de tirer en marchant n'arrivera que tardivement). Même si le majestueux 4e épisode a proposé une relecture magistrale des codes, même si des titres comme Resident Evil : Code : Veronica X et Resident Evil Zero ont tiré leur épingle du jeu, Capcom n'a pas pu s'empêcher de s'empêtrer dans la facilité de l'action, pour en faire "toujours plus".
- Cet objet va vous ouvrir une porte sur l'horreur. -
Le livre revient également en détails sur les influences de son concepteur, Shinji Mikami, mais aussi les œuvres influencées par Resident Evil. Vous lirez donc, plusieurs fois, que oui, Alone in the Dark a bien influencé Mikami, mais pas que. Et qu'au fil des épisodes, la saga s'est elle-même inspirée d'œuvres cinématographiques dont les auteurs citent Resident Evil, premier du nom, comme influence majeure, bouclant la boucle presque en circuit fermé. Et évidemment côté jeux vidéo, les nombreux titres et sagas qui en découlent sont passés au crible, pointant avec justesse les mécaniques reprises chez Resident Evil au fil des époques, et inversement.
Si la lecture de cet ouvrage se fait aisément, il faut savoir cependant qu'il est sous-titré Volume 1 et a été édité en 2015 : cela implique qu'il manque un volet non négligeable de l'histoire, suite au tournant monumental marqué par Resident Evil VII. D'autre part, le livre ayant été écrit à six mains, attendez-vous à quelques redites (oui, au bout de la 3e fois, vous aurez saisi l'influence d'Alone in the Dark sur Mikami). A contrario, pour aider la laborieuse (mais nécessaire) trame scénaristique de la saga, un schéma ou une timeline aurait été d'une aide non négligeable, pour retracer visuellement l'enchevêtrement d'événements de la série.
- De nombreux mais trop courts chapitres, à quand le DLC ? -
Mais le manque le plus important se ressent du côté de la matière exclusive ; si l'ouvrage représente une somme considérable d'informations, leur accumulation est surtout le fruit de recherches en ligne et dans des parutions papier. Dommage de ne pas avoir décroché quelques interviews de l'équipe de Capcom sur les différents titres, pour avoir des informations inédites à se mettre sous la dent. Il n'empêche que la surcouche d'analyses et de passerelles réalisées avec les œuvres cinématographiques et vidéoludiques vous apportera matière à exploration.
📖👀 À lire : Resident Evil : des zombies et des hommes, volume 1, 2015, 224 pages, 24,90 € chez Third Editions.