Test | Jericho : l'équipée sauvage
19 nov. 2007

Testé par sur
Aussi disponible sur
Clive Barker’s Jericho

Apporter un nom célèbre à un jeu vidéo produit toujours son petit effet, mais l'implication de la personnalité dans le développement du jeu reste souvent très limitée. Clive Barker est un peu l'exception qui confirme la règle. Après avoir travaillé sur le sous-estimé Undying, l'auteur britannique s'attaque encore au FPS avec Jericho, jeu mélangeant horreur et action militaire. Le tout pourrait être très banal mais c'est sans compter sur le génie de Barker et l'excellent travail des espagnols de Mercury Steam.

L'ancien testament selon Clive Barker

Quelque part au fin fond du Moyen-Orient, les ruines de la cité d'Al-Khalid attendent la venue d'un sorcier assez fou pour tenter de réveiller les horreurs qui y rôdent. En effet, cette cité n'est qu'une façade pour le Pryxis, une sorte de boite où repose le premier-né : la première création de Dieu, enfermée par le Seigneur pour contenir sa puissance. De peur que cette abomination soit libérée sur Terre, sept prêtres sumériens ont enfermés la créature au cœur de la cité. Depuis, à différentes époques de l'Histoire, sept guerriers se sont aventurés au sein de cette région maudite et ne sont jamais réapparus. Et vous qu'avez-vous à voir avec cette galère ? Vous incarnez le capitaine Devin Ross, un militaire plus futé que la moyenne qui se trouve être également un guérisseur psychique. Sous vos ordres, six bidasses d'un genre un peu particulier puisqu'ils sont tous dotés de pouvoirs divers et variés. Ensemble, vous formez la section "Jericho", le dernier rempart de l'humanité contre toutes les bestioles un peu surnaturelles. Vos problèmes commencent lorsque l'avant poste des gardes suisses présents sur le site de fouilles des ruines d'Al-Khalid se fait attaquer par des sectateurs fous. Dirigés par Arnold Leach, un ancien allié de "Jericho", ses derniers tentent d'ouvrir la faille temporelle au cœur du Pryxis afin de libérer le premier né. Pour éviter ce cataclysme, vous devez remonter dans le temps à travers les différentes époques de la cité où la faille s'est ouverte : la Seconde Guerre mondiale, les croisades, la Rome antique, voire même au-delà. Sauver le monde fait partie de vos attributions sauf que cette fois, un problème gênant vous fait obstacle. Très vite, vous assistez impuissant à la mort de votre personnage...

Les sept salopards

L'un des boss du jeu dans toute sa splendeur : observez et tremblez.

D'habitude synonyme de "Game Over" immédiat, la mort du capitaine Ross constitue au contraire le début des choses sérieuses. En effet, en tant qu'esprit vagabond, vous pouvez posséder chaque membre de votre unité afin de contrôler ses actions. De plus, vos pouvoirs de guérisseur ont survécu à l'au-delà et soigner vos petits camarades est toujours possible, pour peu que vous puissiez les toucher. Le changement de personnage s'effectue en toute simplicité, en visant le personnage et en appuyant sur A ou en passant par un menu. Connaître les membres de l'escouade "Jericho" et savoir utiliser leurs talents s'avère décisif pour progresser dans le jeu. Le panel des personnages est très varié. Black est une tireuse d'élite douée de télékinésie, le père Rawlings soigne les personnages, Delgado possède une mitrailleuse et invoque un esprit de feu pour lui venir en aide, Cole arrête le temps et crée des munitions, Church paralyse les adversaires et Jones est un médium. Les différents pouvoirs sont très agréables à gérer et assez originaux. Mention spéciale à la balle fantôme qui permet de guider une balle de fusil sniper pour perforer jusqu'à trois cibles. Toutefois, même si vous pouvez ressusciter vos camarades, la situation peut très vite tourner au drame. Le défi proposé par Mercury Steam impressionne tant la puissance de l'escouade "Jericho" semblait importante mais en fin de compte, les vagues d'ennemis peuvent très vite avoir raison de votre équipe entière. De temps en temps, afin de rompre la routine du massacre, Jericho vous propose de jouer avec un seul personnage. Ces moments, trop rares, permettent de ressentir l'ambiance malsaine du jeu et d'approfondir la maitrise du personnage et de ses pouvoirs à travers des défis variés.

Ce soir chez Boris, c'est soirée disco !

Quelques cinématiques interactives entrecoupent parfois l'action.

L'atout majeur de Clive Barker's Jericho est avant tout son ambiance. Les amateurs des fameux cénobites d'Hellraiser reconnaitront sans peine les nombreuses références et allusions qui parsèment l'univers. Défouloir pervers pour un être diabolique et inhumain, le Pryxis n'est décidément pas un endroit que tout le monde peut apprécier. Ainsi, les décors majestueux de la Rome antique sont inondés de sang et de parodies de légionnaires romains torturés. L'empreinte de Clive Barker se ressent également sur le bestiaire qui ne laisse pas indifférent : matrones sado-masochistes nazis, enfants croisés coupés en deux et gladiateurs difformes. La trame de fond bénéficie également d'un soin particulier provenant de l'auteur et vous promet quelques surprises. L'ambiance sonore reste très discrète avec une bande son agréable mais qui ne laisse pas un souvenir impérissable et des bruitages corrects. Par contre, la personnalité des membres de "Jericho" a fait l'objet d'un véritable travail : vos coéquipiers passent leur temps à se charrier et à essayer de détendre l'atmosphère. En effet, les développeurs installent un véritable décalage entre le contexte glauque et pervers et la mentalité du commando, vous permettant de prendre du recul face à l'univers dément de Clive Barker. La localisation française demeure également de très bonne facture. Petit plus agréable, chaque succès débloqué vous permet de consulter un dossier des archives de la section "Jericho", apportant son lot de révélations sur les personnages clés de l'histoire. Une bonne façon d'approfondir l'aventure de manière indirecte.

Qui a éteint la lumière ?

Les sectateurs explosifs sont une plaie et arrivent toujours par vagues.

Comment proposer une ambiance sombre et malfaisante sans baisser la luminosité ? Mercury Steam ne s'est vraisemblablement pas posé la question puisque vous passez tout votre temps dans le noir. Vous possédez bien une lampe torche mais celle-ci s'éteint au bout de quelques minutes. Clive Barker's Jericho présente donc tous les symptômes du phénomène Doom 3, à savoir une obscurité fatiguante et omniprésente. Au fur à et à mesure de l'aventure, l'obligation de monter la luminosité du poste devient le principal défaut de Jericho tellement le jeu est sombre. Hélas, un autre problème de taille apparaît rapidement. La majorité des conflits dans les différentes époques se résument à arrêter X vagues de monstres arrivant à l'infini pour un temps donné dans un couloir sombre. Pourtant, certains points de passages dantesques viennent relever l'action mais ces passages paresseux et ennuyeux sont trop nombreux pour être pardonnés. Surtout que huit petites heures sont suffisantes pour plier la partie. La perle du jeu revient à l'absence pure et simple de conclusion, comme si les développeurs n'avaient pas eu le temps de terminer le jeu ou de réaliser une cinématique de clôture. Autre regret : Jericho ne propose pas de multijoueur. L'absence d'un mode coopératif se fait ressentir et aurait apporté un réel intérêt à l'aventure.
Les Plus
  • Une équipe du tonnerre !
  • Le délire macabre et sanglant
  • Un scénario malin
  • Des pouvoirs très rigolos
  • Quelques passages d'anthologie
Les Moins
  • Beaucoup trop sombre
  • Construction des niveaux paresseuse
  • Où est la fin ?
  • L'absence d'un mode coopératif
Résultat

Jericho est l'exemple typique du jeu que vous achetez parce que vous souhaitez vous plonger dans l'histoire. Malgré de solides trouvailles au niveau de ses mécanismes, ce titre possède trop de lacunes pour intéresser les aficionados des jeux de tir à la première personne. Tout se joue au niveau de l'ambiance et du scénario : mélangeant habilement horreur et délire militaire, Clive Barker vous pousse toujours plus loin dans l'exploration de sa boite à jouets perverse. Jericho surprend, choque, peut dégouter mais ne laisse pas indifférent. Pensez toutefois à augmenter la luminosité de votre téléviseur.

Partagez ce test
Tribune libre