Test | Dustborn
03 oct. 2024

Un road trip humain

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Dustborn

Quel meilleur moyen que de transformer un vol en road trip entre amis pour vous recentrer sur votre vie et revoir vos priorités ? Embarquez dans le bus avec Pax et ses amis et plongez dans une réflexion profonde sur le monde. Dustborn, un jeu narratif du studio Red Thread Games, prend le partie de s'engager sur un sujet sensible souvent décrié. Un voyage philosophique et humain rempli de bonnes idées.

L'histoire

Guitare en main, à bord du tourbus en route vers la Nouvelle-Écosse, Pax et ses compagnons de route forment les Dustborn. Le groupe va rouler de ville en ville pour faire vibrer son public. Mais ce road trip musical n'est qu'un prétexte pour ces marginaux. Leur véritable intention : livrer un mystérieux paquet en dehors des États-Unis, moyennant finance, et ainsi espérer vivre un semblant de liberté dans un monde uchronique. Un monde où les événements tels que nous les connaissons ont subi des modifications qui ont transformé le cours de notre Histoire.

Vous incarnez Pax, une jeune femme se désignant comme une Anome, une personne possédant de puissants pouvoirs s'exprimant au travers de sa voix et de ses émotions. Seul souci, les Anomes sont considérés comme des individus déviants et donc recherchés par les Puritains, un groupuscule tout-puissant. Cerise sur le gâteau, ces derniers étaient propriétaires des données que Pax et ses amis ont dérobées. Le voyage vers la liberté s'annonce donc des plus mouvementés !

Au-delà de son style graphique unique s'inspirant des comics, à l'instar des jeux The Walking Dead de Telltale Games, Red Thread Games signe ici un titre narratif se rapprochant de l'identité même de son éditeur, Quantic Dream, en termes de registre vidéoludique. Un titre où les relations entre les personnages sont cruciales pour avancer de façon optimale dans l'aventure.
J'aime quand un casse se déroule sans accro, mais comme rien se passe comme prévu...

Le principe

Trop d'indications à l'écran ? Mettre en pause vous aide à retrouver des dialogues manqués.

Dustborn est un jeu narratif. Si votre envie est donc de foncer tête baissée dans le scénario sans commencer par en apprendre plus sur les différentes personnalités de vos compagnons, alors il est clair que vous accumulerez les mauvais choix qui casseront la confiance et la motivation de vos interlocuteurs tout au long de votre périple. Confiance et motivation qui auront des répercussions sur le dénouement final de l'aventure.

Outre la narration, Dustborn arrive à innover en s'agrémentant d'idées provenant d'autres genres. Des ajouts bienvenus permettant de rendre le jeu plus dynamique. Mais forcé de constater qu'il souffre d'un manque de rigueur. Tantôt d'une lassitude déconcertante, tantôt un enchaînement de phases d'action, le jeu se laisse facilement submerger par un manque cruel de dynamisme sur la longueur. Les personnages étant constamment en train de discuter, et cela même si vous n'avez déclenché aucun dialogue.

Ajoutez à cela que le titre est exclusivement en anglais, vous aurez beaucoup de de sous-titres à lire. Le jeu est donc très bavard, voire indigeste malgré une seconde moitié qui a le mérite de délivrer des rebondissements bienvenus.

Fort heureusement, le studio, ayant compris les limites de son titre, a su contrebalancer ce manque de rythme en y apportant des ajouts comme précédemment évoqués. Ainsi, le jeu réussit encore plus à innover dans sa proposition en utilisant le background de son univers.
Un jeu narratif, trop narratif ? C'est un comble !

La musique

Rock'n'Roll !

Pour aller au bout de son périple et réussir sa traversée de cette Amérique uchronique, l'équipe se fait passer pour un groupe de musique en tournée dans tout le pays. C'est là le plus gros point fort du titre : la musique. Dustborn possède une bande-son de qualité très orientée Pop-Rock avec des musiques uniques créées spécialement pour l'occasion. Des musiques que vous pouvez faire découvrir à votre public lors de concerts, avec un mini-jeu qui vous demande, façon Guitar Hero, d'appuyer au bon moment sur les touches correspondantes pour scorer le plus possible (même si le score de ne sert véritablement à rien).

Cette expérience musicale agréable ne s'arrête pas qu'aux sessions de concert parsemées tout au long de l'aventure. En effet, en dehors de l'exploration, chaque chapitre se clôt par une fin de journée autour d'un feu de camp où vous pouvez prendre des nouvelles de vos amis, leur offrir des cadeaux (que vous aurez dénichés dans les chapitres), faire des répétitions musicales, ou composer dans le but de débloquer de nouvelles chansons afin d'étoffer votre répertoire.

Vous avez plusieurs titres disponibles au fur et à mesure, souvent en lien avec l'ambiance des chapitres. Vous commencez avec "We're the Dustborn", titre accrocheur, rythmé, qui ne cache pas une certaine inspiration de groupes tels que The Veronicas, Blink 182, Avril Lavigne, et autres. Une ambiance sonore volontairement inspirée des années 2000, où une certaine liberté des individus se ressentait. Ce que le jeu tente de prôner sans honte. Mais cette ambiance sonore ne s'arrête pas uniquement à cela. En effet, des titres à la consonnance plus "expérimentale" trouvent eux aussi leur place dans ce melting pot musical. De quoi rendre l'expérience complète et chatoyante aux oreilles.
Sur une bande-son rock, vous parcourrez l'Amérique de l'ouest à l'est

Les pouvoirs

Concert, chasse aux fantômes, et faire face à des tentacules géantes : une journée normale.

Alors que votre personnage, Pax, tente de renouer avec son passé, vous découvrez que ces fameux êtres dotés de super-pouvoirs sont apparus à la suite d'un événement mystérieux. Suite à cela, des « Échos » d'événements passés ont erré un peu partout, allant jusqu'à s'accrocher aux humains, les contraignant à être plus agressifs et plus paranoïaques.

C'est à ce moment que le jeu devient une chasse aux fantômes. Muni d'un petit appareil électronique, vous pouvez capturer ces mystérieuses résonances pendant vos explorations. En accumuler un certain nombre permet de débloquer de nouvelles capacités ; des compétences aux multiples usages. Notamment lors de discussions pour, par exemple, arrêter une dispute au sein du groupe d'amis ou calmer des personnes stressées, ainsi que lors de phases de combat. Permettant de prendre le dessus sur les ennemis qui se dressent sur votre route.

Dustborn est aussi une aventure proposant des affrontements. Pour les remporter, le pouvoir des mots de Pax est utile pour asséner de puissantes attaques (repousser les ennemis, les paralyser ou encore les terroriser). Cependant, outre cela, vos compagnons se rallient à vous, vous permettant ainsi de lancer des attaques coordonnées. Alors, bien que ces phases de combat suivent un cahier des charges simpliste qui ne révolutionne rien, cela a le mérite d'apporter un plus non négligeable dans le gameplay. Ajoutez à cela un arbre de compétences à l'arme unique que vous récupérez rapidement et vous avez là un jeu qui, malgré son manque de rythme, est plus diversifié qu'il n'y paraît.

Un travail qui se doit donc être salué pour son envie d'améliorer le genre narratif souvent jugé comme lassant et ainsi tenter de toucher un public plus large. Cependant, même si les idées sont plaisantes à prendre en main dans l'ensemble, Dustborn est victime d'un jugement en lien direct avec son message engagé.
Who you gonna call ? Dustborn !

Pour qui ?

Les meilleurs moments entre amis pour se recentrer sur les petites choses de la vie.

Le titre de Red Thread Games a vivement été critiqué. Lui reprochant d'être un jeu inclusif, trop « woke » par certains. Il tente d'illustrer, par son scénario et ses personnages, un sujet de société. Et pour beaucoup, ce choix artistique n'a pas à exister dans le monde vidéoludique.

Alors oui, le jeu met en avant des personnages LGBTQIA+ ! Oui, il y a des termes inclusifs comme le pronom « iel » utilisé pour un personnage ! Oui, il y a un personnage musulman qui porte le voile et qu'on peut retrouver par moment isolé du groupe pour prier ! Mais, Dustborn n'est pas plus différent d'œuvres déjà existantes. Comme les comics X-Men qui, depuis les années 60, font tout autant preuve d'inclusivité tout en restant encore aujourd'hui des bande dessinées autant plébiscitées.

Dustborn n'est donc pas fait pour tout le monde en matière de genre de jeu mais cela reste une œuvre vidéoludique qui a le mérite d'exister pour ce qu'elle est avec son discours assumé et engagé qui illustre en tout point notre société actuelle, qui met en avant deux camps que tout oppose. Tout en permettant aux joueurs de les encourager à ouvrir les yeux sur les travers de l'être humain, sur l'évolution de notre société et sur l'acceptation des différences.
Dustborn, un jeu tout public ?

L'anecdote

Une image vaut mieux qu'un long texte.

Sujet complexe qu'est l'inclusivité de nos jours, n'est-ce pas ? Ce mouvement est-il du forcing pour écraser les idéaux de certains ou simplement une évolution logique des mentalités ? Nous pourrions en débattre des heures, mais si nous prenons l'exemple de Dustborn, les critiques qu'on lui donne sont-elles justifiées en ce sens ? Je dirais que oui et non ! Et c'est ici que je vais essayer de vous expliquer en quoi Dustborn est loin de faire une quelconque apologie dominante des minorités sur la population, puisque j'ai eu l'expérience de cela en dehors du jeu et j'avais envie de vous le partager pour tenter de vous montrer ce qu'est ce titre avec mes propres mots.

Je ne pense pas être la personne qui connait le mieux le sujet, je pense au contraire ne pas saisir toutes les subtilités que cela comprend mais lors de mon expérience avec Dustborn, après avoir côtoyé tous ces personnages aussi différents les uns des autres, il y en a bien un auquel j'ai pu m'identifier dans le regard qu'on peut avoir face à la différence : Théo. Ce dernier est la représentation de ceux tiraillés entre les deux extrêmes opposés. Ce personnage est sans doute celui qui, inconsciemment, a le plus d'importance.

J'ai contrôlé Pax mais c'est au travers des discussions que j'ai eues avec Théo que je me suis rendu compte que le titre tentait, à sa petite échelle, de mettre des mots sur ce qui nous divise. D'abord avec de l'incompréhension de point de vue entre deux individus puis avec de l'empathie sur les ressentiments de chacun et la peur de l'autre. Au travers des pouvoirs des Anomes qui ne sont que les reflets des mots. Les mots font mal, les mots sont des armes pour tous ceux qui refusent de comprendre que vous soyez pour ou contre cette inclusivité.
Les mots font mal, les mots sont des armes
Les Plus
  • Des rebondissements touchants
  • Style graphique et mise en scène inspirés des comics
  • Des ajouts de gameplay ponctuels bien pensés
  • Un sujet d'actualité qui fait réfléchir
  • Le côté music band en tournée
Les Moins
  • Les rebondissements arrivent hélas tard dans la seconde moitié
  • Rythme bâtard
  • Certains éléments du scénario ne trouvent pas de conclusion ou d'origine
Résultat

Malgré un rythme bâtard, causé par une surcharge de dialogues et une lenteur dans l'exploration, Dustborn n'est pas un mauvais jeu. Au contraire, le titre de Red Thread Games, bien qu'étant moyen et n'inventant rien, possède un style graphique et un texte engagé qui en font tout l'intérêt. Évidemment, pour peu que l'on soit ouvert d'esprit et intéressé par la réflexion sur l'acceptation entre individus. Le titre est inclusif mais ne se limite pas à cela, ce qui n'en fait pas un jeu éviter si le genre narratif vous intéresse. Le jeu ne force pas à aimer ou détester quoi que ce soit mais il offre, à son niveau, la possibilité à chacun de comprendre autrui.

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