Le calvaire de Sisyphe
- Éditeur Sony Interactive Entertainment
- Développeur Housemarque Games
- Sortie initiale 30 avr. 2021
- Genre Third Person Shooter
À 80 € le jeu PlayStation 5, pas le droit à l'erreur. Est-ce qu'un rogue-like élitiste à gros budget peut trouver son public ? Est-ce que Returnal ne risque pas de vous dégoûter du genre ?
L'histoire
Le principe
Les Mycomorphs vous immobilisent dans une toile avant de vous achever.
Vous me direz : OK s'ils y vont un peu fort avec les -50%, c'est la nature même des rogue-like d'apprendre de ses runs ratés. C'est ce qui les rend si stressants : en cas d'échec, on ne reprend pas 3 secondes avant sa mort comme dans tous les jeux mainstreams actuels (coucou Marvel's Spider-Man : Miles Morales). Sauf que. Dans Returnal, vous allez parfois perdre une ou deux heures de progression. A cause d'une pièce aléatoire. De quatre Mycomorphs redoutables dans une salle verrouillée. Ou d'un boss. Sans avoir rien récupéré qui ne puisse servir au run suivant.
Au début, quand vous êtes dans le premier biome, ça va, ce n'est pas très grave. Vous recommencez, vous n'avez pas perdu grand chose. Quand vous en êtes au troisième… C'est terriblement frustrant, même si les scénaristes ont pensé à une surprise qu'il ne faut pas vous spoiler – bon allez, disons qu'à partir d'un certain niveau, vous ne recommencez plus le jeu depuis le tout début. Stressant malgré tout, vu que le jeu vous décourage de faire des pauses. Si vous quittez le jeu pour rejoindre des amis en ligne, sur Rocket League au hasard, votre run en cours est perdu. Il n'existe pas, en tout cas au moment de la sortie du jeu, de fonction « Sauvegarder et Quitter » – fonction pourtant âprement réclamée sur les forums. Ah, et pensez à désactiver les mises à jour automatiques. Si vous mettez votre console en veille mais que le jeu est patché pendant la nuit, vous perdez votre run… Dommage si vous étiez juste avant un boss.
Le gameplay
Une fois débloquée, l'épée reste disponible dans les prochains runs.
Reste un élément frustrant, en tout cas à la sortie du jeu : l'équilibrage. Le ratio entre risque et récompense est très défavorable au joueur. Coffres et bonus contaminés donnant des malus éliminatoires, salles bonus renfermant des pièges, génération procédurale des niveaux créant des salles parfois très déséquilibrées, bonus de santé hors de portée parce que vous n'avez pas encore obtenu le bon objet… Sans oublier les bonus contaminés entraînant un dysfonctionnement de votre combinaison. Résultat : le jeu vous pousse à rusher, à esquiver les ennemis pour revenir plus vite au boss, et à ignorer la plupart de ses mécaniques. Chaque salle non indispensable à votre run risque de vous tuer et de vous faire perdre toute votre progression – sacant que les portes facultatives sont indiquées sur votre carte. Les looters nés qui adorent rincer un dongeon en seront pour leurs frais : à quoi bon explorer la carte quand le manque cruel de bonus de santé vous fait perdre petit à petit tout espoir de vaincre un boss ? A quoi bon prendre un bonus de santé infecté si le malus associé va faire baisser votre vie ?
Vous pouvez vous débarrasser des malus en remplissant certaines conditions mais dans les faits, le temps d'y arriver, vous risquez parfois de perdre votre run (drame vécu). Certaines conditions sont faciles : créer un objet, tuer 6 ennemis au corps-à-corps. D'autres vous obligent à trouver une relique, un objet hyper rare planqué dans le niveau – bonne chance. L'équilibrage changera peut-être au fil du temps, mais Returnal a clairement manqué de beta tests ou d'early access pour équilibrer son gameplay avant sa sortie. Les premiers patchs ne vont d'ailleurs pas vraiment dans la bonne direction. L'un d'entre eux a corrompu les sauvegardes des joueurs, un autre a supprimé la régénération illimitée qui était disponible dans votre vaisseau. Résultat : les forums regorgent de joueurs mécontents – beaucoup ont même réinstallé le jeu sans aucun patch pour profiter de la version "vanilla" du jeu.
La version PS5
Apprenez à dasher au dernier moment pour éviter les tirs ennemis.
En matière de sensations, le jeu fait parfois aussi bien qu'Astro's Playroom. La pluie par exemple se ressent manette en main. Revers de la médaille : le jeu vide la batterie de la DualSense à vitesse grand V. Et les temps de chargement ? Ils sont quasiment invisibles. Une nécessité dans un rogue like où on passe son temps à mourrir et à renaître : si vous n'étiez pas catapulté immédiatement dans un nouveau run après votre mort, la tentation serait grande d'éteindre la console. Et peut-être même de revendre le jeu !
Pour qui ?
Archonact trop grand pour cette salle au trésor facultative... Adieu : ça vous apprendra à looter.
L’anecdote
La planète raconte l'histoire d'une civilisation alien disparue. Comme dans Prometheus.
Ne les lisez que si vous galérez à comprendre certains mécanismes de gameplay, idéalement après plusieurs runs. Il faut dire que même en parcourant les pages d'aide dans le jeu, certains mécanismes sont vraiment complexes : la gestion de l'adrénaline, la différence entre l'intégrité de la combinaison et la vie, le leveling des armes… Returnal ne vous force pas seulement au fameux « get good » (« devenez meilleur »). Il vous encourage aussi à rejoindre une communauté qui décortique ses mécanismes et ses meilleures stratégies.
- L'ambiance
- L'envie d'en apprendre plus sur la planète et sur Sélène
- La maniabilité
- La gestion des vibrations DualSense
- L'impossibilité de quitter le jeu sans perdre son run
- Des problèmes d'équilibrage
- Les premiers patchs qui corrompent les sauvegardes ou renforcent la difficulté en début de jeu...
- Le prix
Returnal donne l'impression de ne pas aller au bout de toutes ses mécaniques. Il est impossible de sauvegarder, de quitter le jeu ou de jouer à un autre jeu sans perdre l'intégralité de son run. Un conteneur nocif lambda demande presque autant d'Ether qu'un Reconstructor qui donne une vie supplémentaire. Certaines salles bonus renferment un ennemi puissant qui peut vous tuer. Une machine alien qui vous redonne de la vie fait apparaître des ennemis dès que vous l'utilisez – et tant pis si la salle est trop petite pour un combat ou pour la caméra.
La liste continue, avec morts arbitraires et perte tragique d'une voire de plusieurs heures de grinding fatiguant. Bref, ce n'est pas seulement la difficulté qu'il faut aimer, ou le concept même des rogue-like. C'est le côté encore très aléatoire de l'équilibrage du jeu et de ses ressources à sa sortie. Il faudra peut-être plusieurs mois de patchs et d'échanges avec la communauté pour arriver à une expérience moins frustrante.