Test | Outrun 2006 en fin de course
14 avr. 2006

Testé par sur
Aussi disponible sur
OutRun 2006
  • Éditeur SEGA
  • Développeur Sumo Digital
  • Sortie initiale 31 mars 2006
  • Genre Course

Les années 80 n'ont pas vu naître que des vilaines choses, comme l'apogée de la disco et la mode des vêtements fluos : il y a aussi eu l'apparition des bornes d'arcades, parmi lesquelles celle d'Outrun, l'une des gloires de Sega qui a contribué à poser les bases de la course arcade. Pour son vingtième anniversaire et un an et demie après la sortie d'un Outrun 2, la série déboule sur consoles avec Outrun 2006 : Coast 2 Coast pour reconquérir les nostalgiques et convertir les jeunes impies. Pari réussi ?

La minute blonde

Conformément à l'esprit de la série, Outrun 2006 : Coast 2 Coast, c'est de l'arcade pure, un jeu qui illustre à lui-seul cet état d'esprit old-school et tellement fun qui consiste à répéter mille fois le même geste jusqu'à le maîtriser parfaitement, dans un souci constant de pulvériser le high-score. Résumé express du mode de jeu original pour les petits nouveaux : au volant d'une Ferrari rutilante, vous devez impressionner une jolie blonde assise à la place du mort en réalisant divers exploits, rarement très techniques, mais relevant souvent d'un burlesque qui confine au kitsch : quand il ne s'agit pas simplement de déraper copieusement, il faut éviter de se faire enlever par des extra-terrestres (en ne passant pas sous leur vaisseau), slalomer entre les comètes qui s'écrasent sur la route, ou faire dribbler un ballon de plage géant… Une note de la gentille blonde vient sanctionner votre performance en fin de course, mais encore faut-il finir cette dernière à temps : un chrono qui a une fâcheuse tendance à s'égréner à un rythme indécent pourrait bien écourter vos prouesses. Heureusement, les réactions instantanées de votre douce passagère sont là pour vous mettre du baume au coeur : ça exulte, ça applaudit, ça fait la ola, comme une groupie à un concert de Patrick Bruel.

Insérez une pièce

Les dérapages sont jouissifs et indispensables, tant pour séduire votre belle que pour dompter le chrono.

La subtilité ? C'est vous qui choisissez la difficulté : chaque checkpoint se situe à un carrefour au niveau duquel vous pouvez prendre l'embranchement de gauche ou celui de droite : dans le premier cas, les objectifs fixés seront faciles et vous bénéficierez d'un bonus de temps ; dans le second, vous aurez une marge d'erreur nettement réduite et il vous faudra batailler fermement avec le chrono. Le challenge est donc de savoir jauger soi-même ses propres aptitudes : mieux vaut franchir la ligne d'arrivée avec un score moyen que de se voir stoppé en pleine course avec un bon score, à cause d'un chrono tombé à zéro. Cette dynamique old-school du jeu d'arcade fonctionne toujours à plein tube : sitôt la partie finie, on tâtonne fébrilement le flanc de la console pour trouver la fente où introduire une nouvelle pièce. Néanmoins, ce mode de jeu étant peu étoffé depuis la version de 1986, il convient d'examiner les réelles nouveautés de ce Outrun 2006 : Coast 2 Coast. Si nouveautés il y a.

Entre abondance et stérilité

Objectif basique mais fun : déraper sur le tapis rouge.

Un sinistre constat s'impose : ce nouvel Outrun apporte peu d'eau au moulin de la série, tant il ressemble davantage à une compilation des précédents épisodes qu'à une suite à part entière précédée de son cortège de nouveautés. En effet, Outrun 2006 : Coast 2 Coast est composé à moitié de circuits hérités de Outrun et Outrun 2, et à moitié de nouveaux circuits difficiles à identifier comme tels, à cause d'une trop grande similitude avec les autres. Le réflexe vient alors de délaisser le mode de jeu original pour se tourner vers les autres modes, qui malheureusement ne sauveront les meubles qu'un temps. Car le mode de jeu Outrun, qui consiste à finir le parcours avant la fin du chrono (sans effectuer de cabrioles), semble terriblement fade en cela qu'il s'apparente à une version tronquée du mode coup de cœur ; de même que les quelques courses élémentaires contre des adversaires lambdas ne présentent aucun intérêt, tant elles pâtissent paradoxalement de ce qui fait le charme du mode original : une jouabilité très arcade et une réalisation sympathiquement cheap.

La nostalgie à visage non lifté

Dans Outrun, il y a souvent plus de palmiers au bord de la route que de traffic sur votre chemin.

Alors que tant de séries revenues d'outre-tombe cherchent à remettre au goût du jour leur réalisation pour séduire les nouvelles générations corrompues par le culte de la technique, Outrun 2006 : Coast 2 Coast joue la carte du statu quo, en proposant un gameplay inchangé et une réalisation fidèle aux origines de la série. Paresse de développeurs ou souci d'authenticité ? Difficile de trancher : d'un côté, la conservation de la patte graphique de la série (sobre et bariolée à la fois) et des musiques disco fera vibrer la fibre nostalgique des anciens ; d'un autre, le niveau graphique de l'ensemble est bien trop juste, avec un vilain aliasing et des véhicules modélisés grossièrement, tellement juste qu'il risque d'en devenir rédhibitoire pour les néophytes.
Les Plus
  • Une jouabilité fun et instinctive
  • Un principe addictif
  • Le potentiel nostalgie est bien exploité
  • Des dérapages plus techniques qu'il n'y paraissent
  • Des objectifs au bon goût de n'importe quoi
Les Moins
  • Trop peu de nouveautés
  • Une réalisation en demi-teinte
  • L'effet d'aspiration est sous-exploité
  • Un mode multijoueurs décevant
Résultat

Finalement, ce Outrun 2006 : coast 2 coast a bien du mal à justifier son existence. Certes, le concept original est toujours aussi fun et efficace, mais à quoi bon le décliner en une nouvelle mouture si celle-ci ne fait pas avancer le schmilblick, et apporte tout juste quelques circuits inédits trop semblables aux anciens ? Incapable de répondre à cette question, Sega biaise et résout le problème artificiellement, en proposant une kyrielle de bonus à débloquer au gré des points engrangés: des morceaux de musique, des tronçons de parcours inversés, et surtout une quinzaine de Ferrari prestigieuses (Testarossa, 360 Spider, Enzo Ferrari...). Résumé à cet aveu muet d'impuissance, Outrun 2006 : Coast 2 Coast vient grossir les rangs de ces mythes du jeu vidéo dont le principe de dépassement de soi n'a jamais trouvé un meilleur support que la borne d'arcade. Loin de rassembler toutes les générations, ils ne séduira que deux types de joueurs : les nostalgiques qui sont passés à côté d'Outrun 2, et les néophytes qui voudraient se cultiver, en privilégiant le fun du gameplay plutôt que l'esbroufe de la technique.

Partagez ce test
Tribune libre