Test | Bravely Default II
20 avr. 2021

À la vitesse du patron

Testé par sur
Bravely Default II

Après avoir réinventé la roue, la licence Bravely Default revient avec un deuxième épisode qui a la lourde tâche d'amener un peu de frivolité dans cet univers bien trop loyal du JRPG à l'ancienne. Bravely Default II : nouvel étendard ou grosse baudruche indigeste ?

L'histoire

Rassurez-vous de suite, nul besoin d'avoir fait le premier épisode pour se trouver à l'aise dans cet univers. Bravely Default II fait preuve d'un classicisme et d'une générosité qui ne surprendront pas les habitués et déstabiliseront encore moins les joueurs occasionnels de JRPG. L'histoire lambda d'un archétype amnésique lancé à toute blinde dans une aventure, accompagné de jeunes gens à connaître, avec lesquels il se devra de sauver le monde.

Tellement archaïque que les premières heures en sont exaspérantes. L'écriture du jeu est d'une nullité affolante. Bravely Default II choisit de soutenir un rythme tellement enlevé que les moindres bribes de texte sont évacuées en raccourcis disgracieux, et même si les thèmes sont actuels et matures, ni l'histoire, ni les personnages ne tiennent les promesses d'une quelconque profondeur. Dès lors, la narration pudique s'installe en arrière-plan. Parfois vous n'y ferez guère attention ; puis parfois, au détour d'une quête un peu au-dessus des autres, vous fourmillerez.
Les premières heures sont exaspérantes

La jouabilité

Des chemins à rêvasser.

L'originalité de la licence est un système de combat dit de Brave et Default, c'est-à-dire que vous pourrez, durant les combats, soit réaliser jusqu'à quatre actions de suite, soit vous mettre en garde afin d'ajouter une action au stock précédent (dans la limite de 6) et, au moment voulu, envoyer la totale d'attaques stockées sur l'ennemi. Pas besoin de vous faire un dessin sur les ravages potentiels qui peuvent être envoyés. Néanmoins, la contrepartie est qu'il vous faut attendre autant de tours que d'attaques envoyées avant de reprendre la main sur votre personnage.

Par défaut, une telle mécanique est une horreur en terme de rythme. À tel point qu'il vous est permis d'ajuster la vitesse de jeu en combat et que vous jouerez toujours au maximum d'étoiles. Les combats contre les ennemis lambda sont toujours expéditifs et s'apparentent alors aux rushs accélérés du mémorable Benny Hill. De plus, le jeu propose un rappel de l'action précédente et, à haut niveau, les ennemis sont vaincus automatiquement : les combats n'ont plus aucune raison d'être et le plaisir pris est mitigé et rapproche l'expérience du jeu sur smartphone.

Pourtant, et c'est en contradiction, l'expérience contre les boss et la progression par classe des personnages offrent aux combats une place centrale et véritablement exigeante. Les informations durant les combats étant partielles, il vous est difficile d'avoir une vision claire des coups du boss à venir. Même si une optimisation de l'équipement vous permet quelques fois de vous sortir de situations délicates, vos personnages doivent avoir la capacité de bien encaisser et d'attaquer face à des boss aux barres de vie interminables et aux coups « one shot ». Il s'agit alors de comprendre le fonctionnement délicat des armes, des faiblesses des ennemis, de faire progresser chaque personnage dans les classes disponibles, de jouer de leurs combinaisons afin d'en extraire les avantages en statistiques, en compétences et en nouveaux pouvoirs. Autant vous prévenir que pour bien faire il vous faudra faire preuve de patience, de compréhension mais surtout vous allez devoir monter les levels comme jamais. Le constat est double : sans l'ensemble des outils d'accélération, de facilitation artificielle et disgracieuse le jeu serait une purge injouable, déséquilibré. Malgré cela et si l'on accepte ce postulat, si l'on se prend à ce rythme de l'enfer, le jeu peut-être séduisant, terriblement efficace faute d'exigence et jouissant d'une ferveur qui donne sans cesse envie d'y revenir.
Si l'on se prend à ce rythme de l'enfer, le jeu peut être séduisant

L'univers

Des combats qui se voudraient dantesques.

Surtout que l'univers est magnifique de vie, les paysages sont des odes à l'exploration, les quêtes sont nombreuses, les coffres inutiles qui jonchent vos randonnées donnent envie de vous écarter des sentiers battus... Les villes sont à tomber par terre, bercées par des musiques et un graphisme divins : à chacune son caractère, son ambiance, son charme. Finalement Bravely Default II s'apparente plus à Dragon Quest qu'à un Final Fantasy où le voyage, la promenade, les rencontres bucoliques vous offrent une expérience intime, prégnante, qui marque le joueur par des choses plus sensibles, poétiques et désuètes, qui nous font comprendre que le jeu s'apprécie d'autant plus en mode nomade, conforme à sa généalogie.
Tellement meilleur en mode nomade

Pour qui ?

Le terrain de jeu idéal.

Bravely Default II est un jeu difficile à conseiller. La jeune génération appréciera ses outils d'automatisation à tout va, elle croira même jouer à un jeu à l'ancienne devant la difficulté parce que c'était comme ça dans les anciens jeux. Les plus vieux verront que rien ne va, ni dans le scénario, ni dans les mécaniques fourre-tout, ni dans les combats expédiés et à la difficulté artificielle reposant sur un levelling abusif. Restera sans doute, pour ceux qui auront été au bout, un joli voyage en mode fast-forward qui finalement laissera un goût sympa pour les uns, et une quantité de remontées acides plutôt désagréables pour les autres.
Un joli voyage en mode fast-forward

L'anecdote

Les villes aux tons pastels sont magnifiques.

À noter la présence d'un jeu de cartes Barrage & Domination, entre le placement et la prise de territoires plutôt sympathique, très malin. Sur un plateau de 5x5, vous allez placer plusieurs cartes qui occupent un nombre de cases défini et aux différents pouvoirs. Plusieurs modes de jeu sont présents et modifient les règles de placement. Un jeu plein d'audace qui s'inscrit parfaitement dans cet univers.
Barrage & Domination, un jeu de cartes plutôt sympathique
Les Plus
  • L'univers est somptueux, une invitation constante au voyage
  • Un système de jeu parfait dans sa logique
  • Le très bon jeu de carte Barrage et Domination
Les Moins
  • Tellement speed que ça donne la nausée
  • Fera fuir les fans de JRPG
Résultat

Même si l'important Destiny Connect nous avait préparé au rythme effréné que prendrait le JRPG dans l'avenir, rien ne présageait une telle vitesse. Prétendre que Bravely Default II est un mauvais jeu serait déplacé. Il possède des qualités indéniables qui exigent un certain nombre d'acceptations douloureuses et impossibles pour les uns, et anodines pour les autres. Pour ceux-là, Bravely Default II est un jeu performant, parfaitement inscrit dans son époque, qui possède un univers charmant, des musiques géniales, une aventure équilibrée en adéquation avec sa jouabilité « fast and furious » dont ils sauront tirer entière satisfaction. Pour les autres, les anciens, Bravely Default II est un jeu qui n'a aucun sens, incapable d'inscrire durablement une histoire, des personnages, un système de jeu smartphone, qui les énervera plus qu'autre chose. Seul le temps nous dira ce qu'il en sera de cet opus.

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