MEGGAS 2020 - Maverick

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Maverick

Retour vers le Passé

Doom Eternal Bethesda

Vous faisiez quoi en décembre 1993 ? Vous écoutiez religieusement le discours de Nelson Mandela, prix Nobel de la paix, entre deux albums des Cranberries, d'Ace of Base, de Jamiroquai ou de Radiohead ? Si oui n'ayez pas honte, ce n'est pas grave : l'essentiel est de rejoindre la boucherie la plus proche en mars 2020, date de sortie de Doom Eternal. Et de poser un jour. Pas question de bosser quand la Terre est envahie par des démons décérébrés qui transforment les humains en purée ou en Zombiemen. Notre seul espoir : le Doom Slayer, un Space Marine qui carbure aux riffs électriques du compositeur génial Mick Gordon, et qui fait aussi peur aux démons qu'aux scientifiques paniqués dont il arrache les armes, les badges de sécurité ou les bras. Une mise en bouche avant de harponner les Imps avec le Croc de boucher pour réduire la distance, de les réchauffer avec le Cracheur ardent monté sur l'épaule, ou d'enfoncer leurs crânes d'un coup de talon lors de Glory Kills toujours plus sanglants. Ou d'envahir les parties d'autres joueurs en multi, lors d'un Battlemode qui promet. Du lourd, qui allie avec bonheur la brutalité la plus bestiale (tout id Software est encarté à la National Rifle Association), à l'agilité la plus racée (escalader les murs et utiliser des barres transversales comme un gymnaste cocaïné). Cyber-Mancubus, 1up, shotgun, packs de munitions copiés-collés de Doom II, interface fluo : les années 90 sont de retour, mais sans Nelson Mandela.

Final Fantasy VII Remake Square Enix

Je n'arrête pas de me demander comment Cloud et Aerith auraient fini si Sephiroth n'avait pas empalé la petite marchande de fleurs avec son katana Masamune. J'ai du mal à imaginer Aerith les traits tirés, galérant avec sa poussette dans les rues crades du secteur 5. Ou un Cloud rangé, triple menton et gras du bide, contemplant rêveusement les photos encadrées d'Avalanche, souvenirs ternis qui pourrissent dans un rade glauque racheté avec Barrett. Je préfère les imaginer jeunes, immortels, vitrifiés dans la 4K HDR de Final Fantasy VII Remake. Je veux revoir Midgard dans toute sa beauté de 1997, avec cette claque graphique qui avait mis 10 millions de joueurs (ainsi que la Sega Saturn) à genoux. Je veux retrouver les mêmes sensations de jeu, les dialogues incisifs, les persos charismatiques, les cinématiques éblouissantes, ce saut technologique qui avait défini un avant et un après aussi affûté que la lame de Sephiroth, et que le passage du disque 1 au disque 2 sur PlayStation. C'est cette ivresse que propose Final Fantasy VII Remake, en remettant tous les taquets au max 20 ans après. Nouveau gameplay avec temps réel plus pause active. Changement de perso à la volée, pour cibler et attaquer les caméras de surveillance à distance avec Barrett, boxer avec Tifa ou trancher avec Cloud. Nouveaux graphismes bien sûr. Et grosse pression pour un jeu qui malgré ses 56 bornes au Paris Games Week 2019 exigeait jusqu'à 3 heures de queue aux plus patients pour revivre, une fois encore, l'une des histoires d'amour les plus tragiques de l'histoire du jeu vidéo. Qu'est-ce qu'on dit ? Merci Sephiroth.

Bloodlines 2 Paradox Interactive

J'aime bien les underdogs, ces défavorisés qui galèrent, trébuchent, tombent, se relèvent et retombent encore. J'ai du respect pour eux. Dans le genre, Vampire: The Masquerade – Bloodlines a fait fort dans les années 2000, très fort : 3 ans de développement, dépassements de budget, césarienne en novembre 2004, sortie en même temps qu'Half-Life 2, ventes médiocres, faillite du légendaire studio Troika Games un an plus tard (Fallout, rien que ça), abandon de la licence par Activision... C'est simple, c'est un sans faute. Patché, moddé, ressuscité par les fans, ce jeu prématuré a acquis une solide réputation au fil des années. Est devenu une légende. Et hérite d'une suite en mars 2020, qui se fera probablement rouler dessus médiatiquement et commercialement par la Quadra V-Tech de Cyberpunk 2077, ce bolide shooté au CHOOH2 et aux centaines de millions de dollars du Witcher. D'où ma sympathie pour ce Bloodlines 2. D'où ma curiosité. Pour le Thinblood fragile qu'on incarne au début – un vampire paria écrit par Brian Mitsoda, le Narrative Lead exceptionnel passé par la trinité rôliste des studios de développement Black Isle, Troika et Obsidian. Pour la richesse du Monde des Ténèbres ensuite, un univers noir, violent, adulte. Pour la ville de Seattle avec son pier embrumé, ses ruelles jaunes éclaboussées de néons roses et bleus, ses boîtes de nuit disputées en sous-main par les clans de la Mascarade. Pour la variété du gameplay enfin, entre manipulations verbales, infiltration à base de pouvoirs vampiriques, combats au corps à corps ou massacres au shotgun. Et pour cette licence maudite, cette fleur du mal qui refuse de crever.

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Tribune libre